II
Le contre-texte humoristique et burlesque
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Le clerc amoureux tondu par sa belle (trufa)
Raimon de Cornet
Le troubadour Raimon de Cornet nous est assez bien connu. Originaire de Saint-Antonin (Tarn-et-Garonne), il naquit dans les dernières années du XIIIe siècle. Après des études à Toulouse et une vie très agitée de 1324 à 1330, il devient ecclésiastique et fréquente les milieux littéraires et le consistoire de Toulouse. En 1341, il est chartreux, probablement au moustier de Pontaut (diocèse d'Aire), où il finit ses jours. Son œuvre est assez abondante et variée. Il nous laisse en effet treize cançons, treize vers, quatre letras, six sirventés politiques, six tensons, un planh et diverses autres pièces, dont les acrobaties formelles annoncent les Grands Rhétoriqueurs français (cf. nos 49 et 50). Raimon de Cornet est en outre grammairien et théoricien du trobar. Il est en effet l'auteur d'un Doctrinal de Trobar, sorte de traité de grammaire et de versification, rédigé en cinq cent quarante-trois vers de six syllabes et daté de 1324 ; traité qui a inspiré à son tour un commentaire en prose d'un autre troubadour-grammairien du XIVe siècle, Joan de Castelnou. C'est certainement l'esprit le plus brillant du trobar tardif et qui, beaucoup mieux que Guiraut Riquier, mériterait vraiment le titre de « dernier troubadour » (cf. Introd.).
La trufa (plaisanterie) que nous donnons ici est une cançon troubadouresque très classique, mais dont la texture narrative et le contenu (scabreux) ont quelque chose d'un fabliau.
Texte : NOULET-CHABANEAU.