Les plaintes contre les clercs de la seconde strophe peuvent faire allusion aux difficultés que le clergé causa à Frédéric II : en 1227-1228, le pape prétendait en effet changer le statut de l’église sicilienne et, de son côté, l’empereur n’aimait pas ceux qu’il appelait les “superbes prélats” ; v. E. Lavisse et A. Rambaud, Histoire générale du IVº siècle à nos jours, Paris 1893-1905, II, 194-196.
Le poète pensait peut-être aussi aux troubles de la croisade contre les Albigeois (1209-1229). De toute façon, si passionnée qu’elle soit, la pièce célèbre de Peire Cardenal, Clergue si fan pastor, XXIX, éd. R. Lavaud, 170, à peine postérieure (1229-1230), confirme la mauvaise conduite de certains “clercs”.
Cette chanson a été composée en Provence (v. 66), à la veille du départ de l’empereur, déjà croisé (v. 41), donc entre mars 1226 et le 28 juin 1228, et plus probablement peu avant cette dernière date.
Schéma strophique :
Tc
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1
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M
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C
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R
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1
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PQSg
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4
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Le groupement des manuscrits selon l’ordre des strophes est confirmé par l’étude détaillée des textes.
Il est difficile de situer la strophe unique du ms. Q : il se rapproche de c (33 & 34) et de T (38), mais surtout de Sg (31 & 33), où la strophe a été insérée par le copiste dans un sirventés de Bertran de Born, XXXVII, éd. G. Gouiran, 743. On rencontre aussi une conjonction MQSg (40).
Les rapports entre T et c, qui sont les seuls à posséder l’envoi nº 8 et la strophe 6, sont étroits, comme le montrait déjà l’ordre commun des strophes. Même s’il leur arrive d’être rejoints par M (2, 11, 41 & 48), ils se différencient très souvent des autres manuscrits (7, 9, 15, 16, 22, 23, 24, 27, 28, 29, 31, 40, 44, 45, 49, 62, 63, 64 & 65). Les divergences qui les opposent viennent beaucoup moins de leçons qui rapprocheraient l’un d’eux de Q, Sg (36) ou CR (3 & 14) que des fantaisies ou erreurs du copiste de T (2, 3, 13, 18, 22, 32, 34 & 61) et de quelques fautes de celui de c (18, 21 & 23).
L’existence d’un groupe CR trouve également sa confirmation dans l’étude de détail (9, 11, 18, 23, 24, 27, 28, 29, 31, 34, 40, 41 & 47). On remarquera qu’il est assez souvent rejoint par le ms. M (7, 16, 22 & 45), qui présente pourtant un ordre des strophes plus proche de celui de Tc et surtout un très grand nombre de leçons isolées (3, 5, 9, 10, 13, 18, 19, 21, 23, 24, 25, 26, 27, 28, 29, 31, 34, 36, 38, 41 & 49).
Dans la strophe 5, le copiste de R a omis, sans laisser de blanc, les vers 47-49, avant d’écrire le v. 50 qui prend donc la place du v. 47. Il semble que le copiste de C, qui se distingue déjà de R en donnant l’envoi nº 7, ait voulu compléter la strophe : comme R, il fait du v. 50 de MTc son v. 47, puis il ajoute trois vers nouveaux (de son cru ?) qu’il a naturellement placés en fin de strophe.
T présentant une graphie compliquée, on a pris c pour texte de base.
Sirventés de six dizains, avec deux tornadas, en coblas unissonans.
a
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b
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a
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b
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c
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d
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d
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c
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d
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d
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8
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8
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8
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6’
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8
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8
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6’
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8
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8
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V. I. Frank, Rép. Métr. type 424, nº 4.
Il existe onze textes construits sur les mêmes mètres et les mêmes rimes ; la première chanson est sans doute No posc sofrir qu’a la dolor de Giraut de Bornelh (P.-C. 242, 51), que Bertran de Born a imitée dans son célèbre sirventés Be·m platz lo gais temps de pascor, XXXVII. Les autres pièces citées par Frank sont : Bt Carb. 82, 76 ; Dalft. 120, 1 ; Gl Fabre 216, 1 ; Gr Born. 242, 52 ; Gr Riq. 248, 20 ; P Card. 335, 7 ; Sordel 437, 25 ; Anon. 461, 21.