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Meyer, Paul. Les derniers troubadours de la Provence d'après le chansonnier donné à la Bibliothèque Impériale par M. Ch. Giraud. Paris: Librairie A. Franck, 1871.

259,001- Jacme Mote d'Arle

 

§ VII.

Jacme Mote d’Arles.

(Vers 1290-1).

 

Le nom de ce troubadour n’est pas nouveau dans l’histoire de la littérature provençale. Jehan de Nostre Dame nous l’a conservé. Mais ce qu’il rapporte du personnage est si plein d’invraisemblance que sa notice serait rejetée sans discussion alors même qu’elle ne ferait pas partie d’un ensemble où tout est faux ou suspect. La voici :

Jaume Motte gentilhomme d’Arles, qu’estoit de ce temps (1) un souverain poëte provençal escrivant contre les princes tyrans sans aucune crainte, se moqua d’eux (2) en une chanson qu’il feist de la folle promesse qu’ils avoient faicte au légat (3) : toutes foys le Monge des Isles d’Or et sainct Cezari dyent que nonobstant ceste promesse ils ne faisoient qu’escrire contre la tyrannie des princes.... Ce Jaume Motte d’Arles, ainsi que l’a escript le Monge en la vie de ces quatre poëtes, a faict une description des mauzollées, pyramides, obelisques et autres anciens monumens qui se trouvent en Provence (p. 102).

Que Jaume Motte, ou plutôt, selon notre manuscrit, Jacme Mote, ait composé du temps du comte Raimon Bérenger IV, c’est ce qui n’est pas absolument impossible, mais c’est aussi ce qu’en bonne critique on ne saurait admettre sur la seule autorité de Nostre Dame. Les seuls renseignements authentiques que nous ayons sur ce troubadour sont ceux qu’il fournit lui-même dans l’unique pièce que nous ait conservée de lui le ms. Giraud. C’est un sirventes adressé à Charles II. L’auteur y exprime les espérances que la Provence fonde sur son nouveau souverain. Le premier jour qu’il est venu voir les siens, Charles leur a rendu joie, prix et courtoisie. Joie, soulas, alégresse, étaient morts en Provence; maintenant ils revivent, et tel rit qui ne savait que pleurer. Les Provençaux étaient honnis, maltraités, dépouillés, par ceux qui avaient la charge de leur rendre la justice : il était grand temps que leur seigneur vint auprès d’eux. Le poète mesure habilement l’éloge aux devanciers du nouveau comte. — Le fils de celui qui s’est signalé par ses exploits en Pouille (Charles I) ne peut manquer d’être vaillant, mais il faut aussi qu’il ressemble au preux comte Bérenger (4), et ainsi il sera supérieur à tous ceux qui, maintenant, tiennent le pouvoir.

Cette pièce se laisse dater assez exactement. Le fils de Charles d’Anjou, le petit-fils de Raimon Bérenger IV, bien qu’ayant succédé légitimement à son père en 1285, ne sortit qu’en 1288 de la prison où le tenait renfermé Pierre III d’Aragon. Nous savons qu’il quitta Naples pour la Provence dans la seconde quinzaine de septembre 1289 (5), et qu’en 1291 il était à Aix pour y signer un traité avec Alphonse III (6). C’est donc vers cette époque que Jacme Mote composa son sirventes.

La disposition des rimes, abab ccdd, est des plus communes.

Notons que J. Mote emploie deux fois d’ostre pour de vostre (vv. 16 et 34). Il est intéressant de rencontrer cette forme dans un document daté. Nous la retrouverons plus loin.

 

Notes :

1. Du temps de Raimon Bérenger IV, † 1245. ()

2. « D’eux » c’est-à-dire de Guy d’Uzès, d’Ebles, de Peyre et d’Helias, personnages très-apocryphes auxquels est consacré le chapitre d’où j’extrais les lignes qui concernent « Jaume Motte ». ()

3. Selon Nostre-Dame, ces quatre troubadours auraient promis au légat du pape « que jamais ils ne feroyent chansons contre luy ne contre les autres princes » (p. 101). ()

4. À vrai dire, il y a là une intention de flatterie très-manifeste. Raimon Bérenger IV fut un prince assez insignifiant, et si un troubadour, Aimeric de Peguillan, lui a consacré un planh (Diez, L. u. W. 443), ce fut bien plutôt pour déplorer le passage de la Provence aux mains d’un français (Charles d’Anjou) que pour chanter les louanges du prince défunt. ()

5. Voy. Syllabus membranarum ad regiae siclae archivum pertinentium, 1832, 4°, t. II, première partie, p. 62, note. ()

6. Art de vérifier les dates, 3º édit. III, 825. ()

 

 

 

 

 

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