II
SIRVENTES ET COBLAS
PIÈCES DE CIRCONSTANCE
(SATIRIQUES, LAUDATIVES, MORALES.)
XXVIII.
a b a b c c c b (vers de 10 syll.). Voy. Maus. nº 344. Mêmes rimes dans B. d’Alamanon, I (éd. Salverda de Grave, p. 6). Nous ne savons pourquoi Grœber (Liedersammlungen, p. 664) rattache cette pièce à notre nº XXXIX.
Il ne saurait être question ici du troubadour narbonnais Guillem Fabre, qui vivait à la fin du treizième siècle et dont les deux poésies conservées n’offrent rien qui ait le moindre rapport avec la présente cobla. Le point de mire de Uc pourrait bien être soit Guillem Adhémar, soit le Peire Raimon visé dans les deux pièces qui suivent celle-ci dans le manuscrit. Voici les raisons qui appuient ces deux hypothèses, singulières en apparence.
A) G. Adhémar. Il y a dans les œuvres de ce troubadour maints passages qui expliqueraient les plaisanteries de la cobla : dans la chanson Al prim pres (Appel, Chr., p. 71), les mots brau, brava reviennent à chaque couplet et les v. 1-5 sont remplis de mots allitérant en b ; on y trouve de plus les mots branc (v. 3) et broc (v. 5). La chanson Ben fora (Lex. rom., 345) présente à chaque couplet deux rimes en ocs (dont rocs et brocs) ; la chanson No pot esser (M. G. 1315) présente (c. 5) une métaphore maritime ; la chanson Quan la bruna (Appel, Inedita, p. 118) débute par une description d’hiver (avec mots allitérant en b). — Dans cette hypothèse il faudrait admettre que Fabre n’est pas le nom du poète, mais un sobriquet que lui aurait valu la dureté de ses vers ; on sait au reste que les troubadours comparent souvent leur art à celui du forgeron (voy. plus bas).
B) P. Raimon. Cette comparaison est précisément employée par ce troubadour : Bes tanh qu’un novel chan fabrec, écrit-il dans une chanson citée plus haut (M. G. 942), dont plusieurs passages justifieraient les plaisanteries de Uc : jeux de mots sur apil, fil (c. 3 et c. 4), critz (c. 4), gil (gel, gelée, c. 5) ; dans une autre (Ara pus) description d’hiver (en rimas caras). Il faudrait expliquer par une confusion — bizarre, nous l’avouons —, le fait que Uc attribuerait à G. Adhémar les vers d’un autre de ses concurrents.