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Johnston, Ronald C. Les poésies lyriques du troubadour Arnaut de Mareuil . Paris: Droz, 1935.

TABLE DES MATIÈRES :

PRÉFACE

INTRODUCTION

La vie d’Arnaut de Mareuil

Date de composition

Pièces d’attribution douteuse

Deux idées favorites d’Arnaut

Le roman d’amour d’Arnaut de Mareuil

Les senhals

Les manuscrits

Musique des chansons

NOTES

 

 

LES POÉSIES LYRIQUES DU TROUBADOUR

ARNAUT DE MAREUIL

 

 

TO
MY FATHER AND MOTHER
I DEDICATE
THIS BOOK

 

PRÉFACE

 

Déjà en 1930 je songeais à publier une édition des chansons d'un troubadour. J’ai dû renoncer successivement à l'idée d'éditer Peire Cardenal et Daude de Pradas, ayant appris, après avoir fait un premier dépouillement des manuscrits, qu'un autre s'occupait de ce travail. J'ai pensé que si je prenais Arnaut de Mareuil, dont M. Friedmann avait annoncé une édition en 1910, personne ne songerait à l'éditer sans demander à M. Friedmann s'il avait abandonné son sujet, et que j'éviterais ainsi l'inconvénient désagréable d'avoir à abandonner une édition presque terminée. Pour plusieurs raisons M. Friedmann n'avait pas pu mener à bonne fin son entreprise et il a eu l'extrême obligeance de me passer tous ses papiers, ce qui m'a épargné bien des heures de travail laborieux. M. Friedmann et moi, nous avons l'intention de publier bientôt une édition critique de toutes les œuvres poétiques d'Arnaut de Mareuil ; nous avons discuté ce projet de travail en commun, et plusieurs de mes notes doivent leur origine à des discussions engagées à ce sujet, mais je prends la responsabilité de toute opinion émise dans ce livre, de même que pour la méthode d'éditer les textes.

J’ai présenté cette édition critique comme thèse pour le doctorat d'Université à la Faculté des Lettres de l'Université de Strasbourg. Mon travail a été surveillé par M. le Professeur E. Hoepffner, à qui je ne saurais jamais exprimer suffisamment ma reconnaissance. Lorsque je faisais mes études à Oxford, je passais mes vacances à Strasbourg pour profiter des conseils et de l'érudition de M. Hoepffner. Exerçant les fonctions de professeur de lycée dans un coin perdu de la campagne anglaise, je ne serais famais arrivé à compléter mon livre sans l'encouragement et l'intérêt qu'a eus pour moi M. le Professeur Hoepffner ; beaucoup de ce qui est bon dans ce livre vient de lui, beaucoup de ce qui aurait été mauvais en a été écarté par ses soins.

J'exprime ici ma reconnaissance à mon collègue et ami M. J. R. Dain, qui m'a aidé à corriger les épreuves et à l'Imprimeur F. Paillart dont la collaboration nous a été précieuse pour l'exécution de ce livre dans un délai extrêmement court.

Ayston, Uppingham, Rutland. Mai 1935.

 

 

INTRODUCTION

 

LA VIE D'ARNAUT DE MAREUIL

 

Nous ne savons guère autre chose de la vie du troubadour Arnaut de Mareuil que les indications de la biographie provençale qui, dans les mss ABEIKPRa, précède ses poésies. Nous suivons le texte de C. Chabaneau, Les Biographies des Troubadours en langue Provençale, Toulouse, 1885, page 219.

Arnautz de Maruelh fo de l'avescat de Peiragorc, d'un castel que a nom Maruelh.

Castel signifie une ville ou un village entouré de murs. Mareuil-sur-Belle, arr. Nontron, dép. Dordogne. Les mss. connaissent anssi les graphies Maruoil, Meroilh, Miroilh, et même, dans c, Miroitt ; on trouve quelquefois une version italianisée Merviglia.

e fon clergues de paubra generacio. E car no podia viure per las suas letras, el s'en anet per lo mon : e sabia ben trobar e s'entendia be. Et astre et aventura conduis lo a la cort de la comtessa de Burlatz, que era filha del pros comte Raimon, molher del vescomte de Beders, que avia nom Talhafer.

Taillefer est le vicomte Roger II de Béziers et Carcassonne ; il épousa en 1171 (1) Azalais (Adélaïde), fille de Raimon V de Toulouse et sœur de Raimon VI (2).

Aquest Arnautz cantava be e legia be romans ;

Ses lectures de romans sont d'une importance minime pour ses chansons, mais d'après les références et les allusions dans ses poésies non-strophiques, M. Friedmann (3) (p. 6-9) a pu montrer qu'il avait des connaissances littéraires assez étendues.

si era avinens hom de sa persona, e la comtessa li fazia gran be e gran honor. Et el enamoret se d'ela e d'ela fazia sas cansos ; mas non las (lire lo ?) auzava dire a ela ni a negun per nom qu'el las agues faitas, ans dizia que autre las fazia.

Pour son biographe Arnaut est donc l'amant timide par excellence ; c'est une idée qui se dégage de ses chansons et sur laquelle, à notre avis, on a beaucoup trop insisté.

Mas amors lo forset tan que dis en una canso :

La franca captenensa
Qu'ieu non posc oblidar.

Et en aquesta canso el li descobrit l'amor qu'el li avia. E la comtessa non l'esquivet, ans entendet sos precs e los receup e los grazic ; e·l mes en arnes e det li baudeza de trobar e de cantar d'ela.

La vida n'autorise pas de conclure, comme l'a fait le Moine de Montaudon, que la fidélité amoureuse d'Arnaut n'eut pas de récompense (4).

E fon onratz hom de cort, don fe mantas bonas cansos d'ela, lasquals cansos mostran qu'el n'ac de grans bens e de grans mals.

Les mss. EPR donnent quelques détails de plus.

Vos avetz auzit d'en Arnaut com s'enamoret de la comtessa de Bezers, filha del pros comte Raimon, maire del vescomte de Bezers,

En effet, après quatorze ans de mariage, en l'an 1185 (5), naquit un fils, Raimon-Roger, vicomte depuis 1194 jusqu'à 1209.

que li Frances auciron, quan l'agron pres a Carcassona (6) ; laquals comtessa era dicha de Burlatz, per so qu'ela fon noirida (nada dans E) dins lo castel de Burlatz (7).

Molt li volia gran be Arnautz ad ela, e moltas bonas cansos en fetz de lieis, e molt la preguet ab gran temensa ; et ela volia gran be a lui. E lo reis n'Anfos, que entendia en la comtessa, s'aperceup que volia ela gran be ad Arnaut de Maruelh. El reis fo ne fort gilos e dolens, quan vit los semblans amoros qu'ela fazia ad Arnaut, et auzi las bonas cansos qu'el fazia d'ela. Si la occaizonet d'Arnaut, e dis tan e tan li fetz dire qu'ela donet comjat ad Arnaut, e.l vedet que mais nol fos denan ni mais cantes d'ela e dels sieus precx d'ela.

Arnautz de Maruelh quant auzi lo comjat, fo sobre totas dolors dolens ; e si s'en parti com hom desesperatz de lieis e de sa cort. Et anet s'en an Guillem de Monpeslier qu'era sos amics e sos senher, et estet gran temps ab lui. E lai plays e ploret, e lai fetz aquesta canso que ditz :

Molt eran dous miei cossir.

Il nous semble qu'ici au moins nous entrons dans le romanesque. Pour bâtir cette histoire on n'avait besoin que des faits suivants : Arnaut avait chanté la comtesse de Burlatz, qui avait favorisé ensuite le roi d'Aragon (à qui Arnaut adresse un envoi) ; Arnaut avait mentionné G. de Montpellier (il s'agit de Guillaume VIII, mort en 1202) dans un envoi.

En effet, Alphonse II, roi d'Aragon (1162-1196), était très lié avec le vicomte de Béziers qui, en 1185, adopta le fils du roi (8). Si Adélaïde s'est montrée complaisante à l'égard d'Alphonse, celui-ci lui en a été peu reconnaissant, à en croire G. de Berguedan qui s'adresse ainsi à Alphonse dans la chanson Reis s'anc nul temps :

 

E pot vos hom be mostrar a retraire
La comtessa qu'es domna de Beders,
A cui tolgues, quan vos det sas amors,
Doas ciutatz e cen chastels ab tors,
De tot en tot ara de perdre l'or
Tro·l de Saissac i met autre demor. (9)

 

De ces indications l'auteur de la vida aurait très bien pu tirer sa conclusion que c'est le roi qui a fait chasser le troubadour. Cela s'accorde trop bien avec les craintes d'Arnaut, qui, dans ses chansons, se souvient toujours des désavantages de son humble origine, en priant sa dame de ne pas considérer paratge ni ricor, pour que nous puissions écarter la supposition que le biographe a inventé ce petit roman. Quant au séjour d'Arnaut à Montpellier, il n'en reste aucune trace dans les archives de cette ville, qui sont selon M. Friedmann « eine reiche Fundgrube für Personen..., die in der Umgebung Wilhelms als Zeugen des Fürsten oder der Bürger bei Regierungsakten oder Privatgeschäften auftreten. » (p. 3). Evidemment cela ne prouve pas la fausseté de l'histoire, mais on aurait bien voulu trouver quelque chose de la sorte pour étayer la vida.

Le biographe de Pistoleta (mss. IKN) nous fournit un autre détail. Pistoleta, dit-il, si fo cantaire d'En Arnaut de Maruoill, ce qui semble impliquer que celui-ci avait un jongleur attitré.

Nous ignorons la date de la mort d'Arnaut, et sans doute J. de Nostredame avec son affirmation « il trespassa en l'an 1220 », ne fait qu'une tentative sans fondement pour combler une lacune. Diez (loc. cit.) suggère qu'Arnaut est mort avant Adélaïde, parce que, s'il était vivant à cette date, il aurait écrit un planh. C'est une suggestion qui n'admet pas de preuve et qu'on ne peut guère accepter. ()

 

DATE DE COMPOSITION

 

Si nous pouvions être sûr que toutes les chansons soient adressées à une seule dame (10), et que cette dame soit Adélaïde de Béziers, il serait possible de prendre comme terminus a quo 1171, date du mariage d'Adélaïde, et comme terminus ad quem 1199, date de sa mort. On pourrait préciser davantage. Les chansons décrivent au moins trois étapes de la vie sentimentale de leur auteur, que cette vie soit réelle ou fictive, (a) naissance de l'amour, (b) sa plénitude, (c) regrets des plaisirs passés. Or, le serventois, dont nous avons cité plus haut les vers concernant Adélaïde, fut écrit entre 1191 et 1194 (11) et l'action que G. de Berguedan reproche au roi d'Aragon doit remonter à quelques années plus haut. Si nous admettions que le roi et Adélaïde se sont aimés pendant les années peu avant et après 1185, nous pourrions situer les chansons (c) à la même époque.

Excepté pour une vague référence à un roi d'Angleterre (III, 31-32) Arnaut ne fait pas d'allusion ni à la vie extérieure ni aux événements contemporains (12), nous sommes donc réduit à des spéculations, d'après lesquelles il semblerait que notre troubadour ait écrit entre 1171 et 1190. ()

 

PIÈCES D'ATTRIBUTION DOUTEUSE

 

Enumérons d'abord les poèmes qui sont attribués à tort à Arnaut par un ou deux mss., dont le témoignage ne vaut rien à cause du nombre écrasant des mss. qui ont attribué les poèmes à leur véritable auteur. 

29,15

4 mss. A. Daniel ; A. de M. CR ; G. de Borneil A.

70,10

11 mss. B. de Ventadorn ; A. de M. C reg., R ; F. de Romans C reg. ; G. de Borneil P.

70,16

15 mss. B. de Ventadorn ; A. de M. T ; anon. O.

155,2

10 mss. F. de Marseilla ; A. de M. C ; F. de Romans C reg., R.

213,3

11 mss. G. de Cabestanh ; A. de M. C reg. ; Çirardus Q ; anon. H.

243,10

6 mss. (dont C reg.) G. de Calanso ; A. de M. C reg. ; Ademar de Rocaficha C. (sic !)

305,4

11 mss. Monge de Montaudon ; A. de M. N ; anon. PS.

366,24

7 mss. (dont C) Peirol ; A. de M. C reg., R ; G. de S. Leidier M et citation de β ; P. Vidal C reg., RS.

375,11

12 mss. P. de Capduoill ; A. de M. R.

375,20

15 mss. (dont C reg.) P. de Capduoill ; A. de M. CMR ; Çirardus Q ; anon. HN.

 

On se rappelle que le ms. C est précédé de deux tables.

Il est évident que C, C reg. et R sont les plus suspects en ce qui concerne l'attribution à Arnaut.

Dans C nous trouvons groupés :

111 vº Cui que fin' amors esbaudey

112 rº A guiza de fin amador

112 rº La cortezi' e·l guayez' e·l solatz

112 vº E mon cor ai un novellet chantar

113 rº Tot quant ieu fauc ni dic que·m si' honrat

113 rº Anc mais tam be chantars no·m lic

113 vº Us joys d'amors s'es e mon cor enclaus

114 rº Sabers e cortezia

Sabersfigure aussi dans E, Us joys dans T, Tot quant dans ER, pour le reste C est le seul ms. qui ait conservé ces chansons. Nous pouvons accepter comme étant d'Arnaut de Mareuil six de ces poèmes, c'est-à-dire tous sauf La cortezi' et Anc mais. Le seul qui offre une légère différence de forme est Sabers, et là nous disposons de deux mss., qui font groupe, il est vrai, mais dont l'un n'a pas cru nécessaire de douter de l'attribution de l'autre ; en outre les vers 9-10, 19-20, 22-23 et les strophes IV et V expriment encore une fois les lieux-communs dont se compose la pensée amoureuse d'Arnaut.

Nous rejetons sans aucune hésitation l'attribution à Arnaut de Anc mais et de La cortezi'. Dans la première un chevalier se plaint d'avoir perdu son héritage et demande un cheval et une lance pour qu'il puisse le reconquérir. On ne voit pas très bien Arnaut maniant l'un et l'autre, et pour quelle raison tâcherait-il de regagner ce qu'il n'avait jamais perdu pour l'excellente raison qu'il ne l'avait jamais possédé ? Les rimes en -ic, l'obscurité voulue de plusieurs vers, la fière indépendance dont se vante l'auteur, tout parle contre Arnaut, et nous ne voyons rien dans toute la chanson qui eût pu amener le scribe de C à la lui attribuer.

La cortezi'est adressée à une dame Na Guillelma de Miramons. Pour nous ce personnage reste aussi inconnu et mystérieux que si le poète ne l'avait nommé que par un senhal (Bergert, p. 29) ; mais à la date de la composition de la chanson la clé de l'énigme n'était sûrement pas difficile à trouver, et il est inconcevable qu'Arnaut, lui si discret et si plein de tact, ait proclamé de cette façon le nom de celle qu'il chantait. Quant aux « obscurités » dont parle Chabaneau, nous ne croyons pas au bien-fondé de ce jugement ; il y a une seule difficulté aux vers 30-31, où l'allusion nous échappe, mais le sens n'est pas voilé exprès. Nous ne croyons pas qu'Arnaut se fût servi du schéma de ce poème ; il préfère une forme plus simple et qui ne force pas sa muse, assez rebelle à la contrainte rigide d'une forme trop savante, à se plier à une telle répétition de vers de courte haleine.

Des vingt-six poèmes donnés à Arnaut dans la Bibliographie de Pillet-Carstens, nous ne rejetons que ces deux, mais c'est avec beaucoup d'hésitation que nous admettons l'authenticité du nº 30,18 Lo gens temps m'abelis e·m platz. La question est discutée par M. Friedmann (p. 43) qui fait valoir comme argument qu'il n'est pas dans les habitudes d'Arnaut de mettre le senhal au beau milieu du poème, et il ajoute que la phrase mielhs de be « erinnert an ihn (c'est-à-dire R. de Barbezieux) ». Pour notre part nous indiquons dans les notes de ce poème que les rimes monosyllabiques et faibles, telles que me, se et no, ne se rencontrent pas fréquemment dans les autres chansons d'Arnaut. Les quatre mss. IKa1d, qui attribuent cette chanson à R. de B., ne font qu'un seul groupe. C et α ne s'accordent pas toujours pour leur attribution, et dans ce cas Matfré Ermengaud, s'il avait voulu consulter C, aurait eu à choisir entre A. de M. et P. de Capduoill, ce qui est l'attribution du registre de C. Tous les copistes ont été un peu embarrassés pour trouver un auteur à ce poème, car R le fait passer pour l'œuvre d'Uc de Pena. Il nous semble que d'après les mss. il serait téméraire de vouloir nier l'attribution à Arnaut ; nous l'admettons donc, mais à contre-cœur seulement.

A. Pätzold (13), qui aurait rejeté la chanson dont nous venons de parler, a aussi exprimé des doutes à l’égard des pièces 30,5 Aissi cum selh que tem qu'Amors l’aucia (M. Chaytor discute la question de l'attribution de cette chanson, Ann. du Midi, 21,154, et de même que M. Friedmann (p. 33) ne croit pas qu'elle puisse être de Perdigo), 30,9 Belhs m'es lo dous temps amoros et 30,10 Belh m'es quan lo vens m'alena. Si l'on s'obstine à ne voir dans Arnaut de Mareuil qu'un amant timide et malheureux qui n'a aucun succès auprès de sa dame et qui ferme les yeux à toutes les beautés de la nature, alors seulement on peut refuser de croire à l'authenticité de ces deux chansons de printemps, qui signalent pour nous l'épanouissement de l'amour d'Arnaut. Evidemment il y a des différences d'inspiration et d'expression, puisque les circonstances de leur composition sont si différentes. Nous ne songeons pas un instant à douter de leur authenticité. M. Friedmann (p. 40-42) après une discussion des arguments de Pätzold, se déclare fermement pour A. de Mareuil.

Nous arrivons maintenant à trois chansons d'attribution douteuse que M. Friedmann réclame pour Arnaut de Mareuil ; ce sont A. de Peguillan 29 ; A. de Tintignac 1 ; G. de Cabestanh 6.

A. de Peguillan 29, Hom ditz que gaugz non es senes amor. M. Friedmann (p. 35) constate que le « Gedankengang der Kanzone... erinnert stark an Arnaut, namentlich der Schluss veranlasst mich sie ihm und nicht A. de Peg. zuzuweisen ». Il note que pour l'attribution, de même que pour le texte, CR vont ensemble contre Tc, et il conclut ainsi : « Nach den Hs. haben also beide gleichen Anspruch auf das Lied, nach dem Inhalt möchte ich es Arnaut zuweisen ». M. Friedmann a négligé le ms. O, qui contient une version estropiée de la chanson, mais qui doit pourtant remonter au même chef de file que Tc. Cette version est anonyme, mais se trouve au fº 8, c'est-à-dire parmi les chansons d'Aimeric de Peguillan (14), et non pas parmi les chansons d'Arnaut, lesquelles se trouvent aux folios 41, 51 et 52. Donc le témoignage des mss. est plutôt en faveur de l'attribution à Aimeric. Quant aux ressemblances de style que note M. Friedmann, celles-ci, à notre avis, ne sont pas importantes. Au contraire, le conflit entre les yeux et le cœur, dont traite la moitié de la chanson, ne ressemble pas du tout aux idées arnaldesques. Pour nous le fait que les vers 6 et 7 reprennent une idée qui figure aussi dans les chansons qui sont vraiment d'Arnaut, n'a rien de surprenant. Que l'on relise la chanson A pauc de chantar no·m recre de Folquet de Marseille, (attribuée à Arnaut par C) ; il y a là des ressemblances de forme et de fond beaucoup plus frappantes que celles dont il est question dans Hom ditz, et pourtant personne ne songerait à la donner à Arnaut.

Nous sommes donc de l'opinion qu'il faudrait des ressemblances de style beaucoup plus marquées pour nous faire préférer à l'attribution de Tc à celle de COR.

G. de Cabestanh 6, Lo jorn que·us vi, dompna, primieramen. Ce sont plutôt des raisons de style qui ont amené M. Friedmann à soutenir l'attribution de RUc contre celle de ABCETe. M. A. Långfors (15) a pu démontrer que l'attribution à A. de M. est aussi erronée que celle de DaIK à Peire del Poi. Avec sa conclusion : « On peut considérer comme à peu près certain que la chanson Lo jorn qu'ie·us vi appartient à Guilhem de Cabestanh », nous sommes d'accord.

Il nous reste à parler de la chanson En esmai et en consirier, attribuée à Arnaut par le ms. N et à A. de Tintignac par IKa1d. Ces quatre mss. formant un seul groupe, leur opinion ne vaut ni plus ni moins que celle de N. Cette chanson rappelle A guiza de fin amador, toutes les deux étant construites sur le même schéma, et contenant dans la dernière strophe une apostrophe, à la chanson dans A guiza, à un messager dans En esmai. L'une pourrait bien être une imitation habile d'une chanson arnaldesque, mais laquelle ? Il serait impossible de décider quel est l'original et quelle est l'imitation ; rien dans les deux chansons ne fait douter de leur authenticité. Nous les acceptons donc toutes les deux, de même que M. Friedmann (p. 34-35).

En ajoutant cette chanson aux vingt-quatre que nous gardons de celles qui ont été attribuées à Arnaut par Pillet-Carstens, nous arrivons à un total de vingt-cinq pièces, qui forment l'œuvre lyrique du troubadour Arnaut de Mareuil.

Nous imprimons en appendice les quatre chansons dont nous venons de rejeter l'authenticité. ()

 

DEUX IDÉES FAVORITES D'ARNAUT

 

Arnaut se répète fréquemment ; on n'a qu'à consulter au glossaire de cette édition les mots auzar et merce pour s'en convaincre. En effet il ne se lasse pas de dire qu'il n'ose montrer tous ses désirs et qu'il se contente de demander grâce.

Le thème du rêve, où dans son sommeil il voit sa dame et jouit en imagination des faveurs qui en réalité lui sont refusées, reparaît avec une insistance remarquable dans toute son œuvre :

 

Soven m'aven, la nuoch can soi colgaz,
que soi ab vos per semblan en dormen ;
adonc estau en tan ric jausimen,
ja non volri' esser mais residaz,
sol que·m dures aquel plazens pensatz ;
e can m'esveill, cuich murir desiran,
per qu'eu volgra aissi dormir un an.
(IX, 29-35),

 

et de même X, 18 et XI, 53. Dans ses poésies non strophiques il écrit plus longuement encore à ce sujet (voir Mahn, Werke der Troubadours, p. 153, Mas la nueg trac peior trebalha... ) Il nous assure d'ailleurs qu'il a de telles pensées et de tels songes encore plus souvent qu'on ne le devinerait par ses écrits :

 

Er ai trop dig, mas no puesc mais,
S'una vetz sola ai parlat
So que·l cor a mil vetz pensat.
(M. W., p. 154).

 

Arnaut n'est pas le seul troubadour qui ait raconté ses songes ; ce thème est développé déjà chez Jaufré Rudel, et dans F. de Romans nous trouvons un passage qui ressemble d'une façon tout à fait remarquable aux idées d'Arnaut :

 

Que la nueit, quan soi endurmiz,
s'en vai a vos mos esperiz ;
donna, ar ai eu tan de ben
que quan resvelh e m'en soven,
per pauc no·m volh los olhz crebar,
quar s'entremetton del velhar ;
e vauc vos per lo leich cerchan,
e quan no·us trob, reman ploran ;
qu'eu volria toz temps dormir,
qu'en sonjan vos pogues tenir.
(Donna, eu pren comjat de vos 21-30. Die Gedichte des Folquet von Romans, éd. R. Zenker, Halle, 1896, p. 72).

 

On pourrait s'étonner un peu de trouver le même thème, presque les mêmes paroles chez plusieurs troubadours. Evidemment c'est un moyen d'exprimer des idées audacieuses sans courir le risque de se les voir trop reprocher ; c'est un excellent moyen de suggérer indirectement une idée qui vous ferait peut-être chasser si elle était exprimée crûment en tête-à-tête ; mais une fois devenu conventionnel, ce thème aurait perdu son pouvoir. Nous croyons que ces songes ont un rapport avec le songe prophétique. Si le troubadour savait persuader à sa dame qu'il avait rêvé d'elle, et si la dame croyait que les songes révèlent l'avenir, sa résistance était sérieusement entamée ; après tout, pourquoi résister à l'inévitable ? Voilà peut-être l'explication de la popularité de ces récits de songes.

Arnaut ne se lasse pas de contempler sa dame. Il consacre de longs passages de ses lettres à décrire sa beauté (16), et les chansons contiennent plusieurs références à ses charmes, notamment la troisième strophe de Belh m'es quan lo vens m'alena. Mais ce qui est plus particulier à Arnaut c'est cette image de sa dame renfermée dans le cœur de l'amant par Amour (qui joue un rôle si important dans la vie sentimentale de notre poète) « qu'el cor m'a fag miral ab que·us remir » (IV, 45). Quand il ne peut pas voir sa dame il regarde cette image,

 

« tenc vos el cor ades e cossir saï
vostre gen cors cortes qui·m fai languir»
(VIII, 28).

 

Notre essai de reconstituer le petit roman d'amour dont les chansons tracent le cours, fera connaître la matière de la poésie arnaldesque. Quant à la manière, il nous semble qu'Arnaut s'est rendu compte de la banalité de ses idées, parce qu'il a tâché d'être original dans son choix de schémas et de rimes. Il s'exprime clairement et simplement, n'employant que très peu d'images. ()

 

LE ROMAN D'AMOUR D'ARNAUT DE MAREUIL

 

Nous ne croyons pas qu'un éditeur ait accompli son travail, s'il se contente de faire imprimer dans leur ordre alphabétique les chansons dont il aura établi le texte critique, vu surtout que, dans le cas d'Arnaut de Mareuil, les textes publiés dans les recueils de Raynouard, Mahn, et autres, ont déjà fait connaître l'œuvre du poète, et qu'une édition ne ferait que donner l'ensemble de ses chansons, dont le glossaire rendrait la consultation plus facile. Nous croyons qu'il est de notre devoir d'examiner les idées d'Arnaut et de grouper les poèmes selon quelque plan. Or le plan est esquissé dans la biographie provençale. Le biographe nous dit qu'Arnaut a dépeint dans ses chansons son amour pour Adélaïde de Béziers, qui, après avoir daigné l'écouter, l'a fait chasser de sa cour. En outre il a indiqué à quelles étapes de cette histoire d'amour se placent deux chansons, La franca captenensa et Mout eron doutz miei cossir.

Est-il possible, partant de ces minces indications, d'arranger les vingt-cinq chansons d'Arnaut de Mareuil de façon à faire ressortir toutes les étapes du douloureux chemin qu'a suivi notre troubadour ? La tâche est difficile, et à plusieurs reprises un autre ordre que celui que nous proposons pourra se suggérer au lecteur, comme il s'est suggéré à nous.

30,16. Adélaïde a un amant qui n'ose avouer qu'il chante d'elle ; son amour est un secret connu seulement d'Amour. Ce prétendant fait entendre des louanges de sa dame qui est la meilher de totas las melhors.

30,5. Il décrit les tourments que lui fait souffrir Amour qui l'exhorte à aimer fidèlement sa dame. A Amour tout est possible, les pauvres peuvent monter, comme l'a fait par exemple Jules César (vers 29).

30,15. Le pauvre poète ne peut plus s'empêcher de demander grâce à la dame, en lui disant qu'un amant humble est moins exigeant et plus reconnaissant que ne le serait un puissant seigneur.

30,26 ; 30,2 ; 30,6. Il subit toutes les peines et toutes les douleurs de l'amour, mais il assure à sa dame que, si elle accepte son amour, jamais elle n'aura un amant plus fidèle. Combien il préfère l'attente chez elle à un triomphe facile auprès d'une autre dame. Il reconnaîtra pour son seigneur même un berger du pays de sa dame ; mais il ne doit pas encore formuler des demandes trop ardentes, et il se reproche quelques mots hardis (6, vers 38).

30,34. Analyse de l'amour ; sa conception personnelle n'admet pas qu'on aime plus d'une dame.

30,22. L'amour s'empare complètement de lui à l'exclusion de toute autre joie, ce qui le rend à la fois fier et humble. Ses pensées prennent le devant sur ses actions (vers 38).

30,3 ; 30,4. Arnaut rappelle à sa dame qu'il la connaît maintenant depuis assez longtemps (3,2 ; 4,3) ; il lui dit qu'il commence à rêver d'elle (3,29 ; 4,18) ; il promet d'être discret si elle lui accorde une récompense (4,25).

30,21. Peut-être la réponse à la chanson précédente n'a-t-elle pas été trop favorable (vers 18-19) ; il en est triste, mais Amour le réconforte et il continue à chanter. Si sa dame lui défend de la voir, il regarde l'image d'elle renfermée dans son cœur (vers 32). Il redouble ses protestations de loyauté ; il souffrira tout, mais son désir augmente (vers 38) et encore une fois il a joui d'elle pendant son sommeil (vers 53).

30,17. Il y a eu une explication et la dame a promis quelque chose (vers 24), probablement son amitié, mais non son amour (voir Cui que fin'amors vers 21).

30,20. Louanges de la dame ; nouvelles protestations de fidélité.

34,1. Il ne craint pas les losengiers ; s'il ne triomphe pas, c'est uniquement par excès de timidité.

30,8. Il éprouve maintenant tout le pouvoir d'Amour ; malgré sa fidélité il n'aura pas sa dame si Amour ne l'aide pas. Son cas lui semble si désespéré qu'il regrette presque de l'avoir jamais vue (vers 19 : même idée que 10,29 vers 6). Il rappelle à la dame les plaisirs qu'il a éprouvés dans sa société, son rire et sa conversation ; il lui demande grâce encore une fois, en l'assurant qu'il ne craindra pas les losengiers, qui n'en sauront jamais rien.

30,9. L'espoir naît dans le cœur du poète, ou bien c'est le printemps, ou bien son amour, qui va trouver sa floraison, le fait penser à cette saison.

30,10 ; 30,25. Paratges s'est incliné devant Amour, comblant ainsi les vœux du troubadour. Ces chansons et les deux qui suivent dépeignent sa joie et son bonheur.

30,18. Epoque heureuse ; il demande un baiser (vers 16) qu'il obtient.

30,12. Il compose une chanson pour les amants heureux.

30,1. Mais le ciel s'obscurcit. Il a eu un « don » de sa dame (vers 20), qui a cependant changé d'humeur, et le troubadour craint de retomber dans l'indifférence. Ce changement est-il dû à l'arrivée annoncée du roi d'Aragon ? (à qui s'adresse le deuxième envoi).

30,13. Oui, l'amour du troubadour a perdu sa nouveauté pour la dame, qui le lui reproche (vers 16). Un tel traitement est injuste (vers 20) ; plus elle le dédaigne, plus il l'aime. Il tâche de l'attendrir en lui rappelant qu'il est d'humble origine (strophe IV) ; son amour éclate en louanges (str. V).

Viennent ensuite trois chansons écrites après la rupture définitive.

30,23. La dame ne veut plus de lui, mais il l'aime toujours (str. I). Il essaie de l'adoucir par les moyens qui ont déjà réussi une fois. Elle est puissante, il n'est pas convenable qu'elle se montre orgueilleuse (str. II). Il a fait tout ce qu'il pouvait à son service ; il ne lui demande plus l'amitié, il se contentera de la reconnaissance (str. III). Sa seule faute c'est d'avoir été trop fidèle (str. IV). Ah, qu'elle est belle, cette dame cruelle ! il devrait s'en aller

 

« mas quand ieu pens cals etz que·m faitz languir,
cossir l'onor et oblit la foudat,
e fuich mon sen e sec ma voluntat.»

 

30,11. Il est au désespoir ; il fait tout de même un dernier effort ; il décrit son angoisse — les plaisirs de ce monde sont transitoires — il aurait dû se contenter du peu que voulait lui accorder sa dame (vers 21) ; il a été trop hardi, il a tout perdu. La dame s'obstine à le chasser.

30,19. Il est parti de la cour de Béziers. De son exil il envoie une chanson qui exprime ses regrets pour ce passé où même ses chagrins étaient doux. Sa dernière strophe est toute remplie des louanges de la belle Adélaïde, comme si Arnaut voulait nous assurer que son amour ne s'éteindrait qu'avec son dernier soupir.

Nous ne pouvons pas dire que les choses sont arrivées comme cela dans la vie, mais voilà la vie sentimentale d'Arnaut de Mareuil, telle qu'il l'a racontée dans ses chansons. ()

 

LES SENHALS

 

Dans la plupart des chansons il n'y a aucune indication de la personne à qui elles sont adressées. L'envoi commence généralement par un Dompna ou Doussa dompna, de sorte qu'il est impossible de savoir si elles étaient écrites pour une ou pour plusieurs personnes. Un envoi mentionne le roi d'Aragon, un deuxième le marquis de Montferrat, et un troisième cel cui es Monpesliers. F. Bergert (17) nous dit que sous les senhals de Belhs Carboncles (Mon Carbon dans AB), Mon Frances, Genoës, Ensenhat et probablement Ben S'Eschai se cachent des personnages masculins. Quant aux autres senhals, Bel Esgart, Belh Vezer, Gen Conquis et Na Ses Merce (?), rien ne nous avertit s'il s'agit d'une seule dame ou de quatre dames différentes. Diez (op. cit., p. 121) identifie Gen Conquis avec Adélaïde de Burlatz, mais cette identification ne peut pas être prouvée. Comme l'a noté F. Bergert, Gen Conquis peut signifier deux choses : « Diez fasst die Form der senhal auf als « Holderrungen ». Es ist aber möglich conquis als 3. Pers. Perf. Akt. zu nehmen : « Hold bezwang sie ».

En effet, si Arnaut a voulu empêcher qu'on découvre le nom de sa dame, il a admirablement réussi. Si nous n'acceptons pas le témoignage du biographe provençal, il est impossible, en prenant comme point de départ les chansons, d'arriver à aucune conclusion à ce sujet. Tout ce qu'on peut dire, c'est que le poète parle avec une telle sincérité de sa fidélité à une seule dame, et de l'impossibilité d'en aimer plus d'une, qu'il est probable qu'il s'est servi de plusieurs senhals, et qu'il a même évité un senhal dans la plupart de ses poèmes, afin de dérouter les curieux et de cacher à jamais l'identité de celle qu'il aimait. ()

 

LES MANUSCRITS

 

Pour les versions de A B Dc F G Kp O P Q U a a1 et c nous nous sommes servi d'éditions diplomatiques.

Nous avons consulté S à Oxford, et nous avons fait photographier C D I R.

M. Friedmann a eu la grande amabilité de nous passer les copies de E Fa K L M N T b d et f qu'il avait faites ou qu'il s'était fait faire avant la guerre.

Il est question de vingt-huit manuscrits (sans compter les œuvres où se trouvent des citations de quelques vers) dont voici la liste selon Pillet-Carstens, Bibliographie der Troubadours, Halle, 1933.

A = ROME. Biblioteca Vaticana 5232. Pakscher et De Lollis, Studi di fil. rom. III.

B = PARIS. Bibliothèque Nationale, franç. 1592. De Lollis, loc. cit., p. 671.

C = PARIS. Bibl. Nat., franç. 856.

D = MODENA. B. Estense, α R, 4, 4.

Dc = fº 243-360 de D. Teulié et Rossi, Annales du Midi, XIII, 60, 199, 371 ; XIV, 197, 523.

E = PARIS. Bibl. Nat., franç. 1749.

F = ROME. B. Chigiana L. IV, 106. E. Stengel, Diplomatischer Abdruck unter Heranziehung von Fª... : Die prov. Blumenlese der Chigiana, Marburg, 1878.

Fª = FLORENCE. B. Riccardiana 2981.

G = MILAN. B. Ambrosiana R 71 sup. G. Bertoni, Gesellschaft für roman. Lit. Bd. 28.

I = PARIS. Bibl. Nat., franç. 854.

K = PARIS. Bibl. Nat., franç. 12473.

Kp = COPENHAGUE. Kgl. Bibliothek, Thottske Samling Nv. 1087. E. Stengel, Zeits. für. roman. Phil. I, 387 (1877).

L = ROME. B. Vaticana 3206.

M = PARIS. Bibl. Nat., franç. 12474.

N = CHELTENHAM. Mr Fitz-Roy Fenwick's Library 8335.

O = ROME. B. Vaticana 3208. C. de Lollis. Atti della R Accad. dei Lincei, 1886, serie quarta. Classe di scienze morali, storiche e filologiche. Vol. II, Parte Iª.

P = FLORENCE. B. Laurenziana, Plut. XLI cod. 42. E. Stengel, Archiv für das Stud. der Neueren Sprachen... XLIX 59, 283, L 241.

Q = FLORENCE. B. Riccardiana 2909. G. Bertoni, Gesellschaft für. roman. Lit. Bd. 8.

R = PARIS. Bibl. Nat., franç. 22543. (Nous citons les folios d'après la numérotation de nos photographies. Pillet-Carstens suivent l'ancienne numérotation.)

S = OXFORD. Bodleian Library, Douce 269. (Nons avons consulté ce ms. sur place. W. P. Shepard en a publié une édition dipl. Princeton-Paris, 1927).

T = PARIS. Bibl. Nat., franç. 15211.

U = FLORENCE. B. Laurenziana, Plut. XLI cod. 43. Arch. 35, 363.

a = FLORENCE. B. Riccardiana 2814. E. Stengel, Rev. des L. R., XLI, 351 ;

XLII 5, 305, 500 ; XLIII 196 ; XLIV 213, 328, 423, 514 ; XLV 44, 120, 211.

a1 = MODENA. B. Estense. Càmpori γ. N. 8, 4 ; 11, 12, 13. G. Bertoni. Collectanea Friburgensia, nouv. série, fasc. XI. Il canzoniere prov. di Bernart

Amoros., Fribourg, 1911.

b = ROME. B. Vaticana, Barb. 4087.

c = FLORENCE. B. Laurenziana, Plut. XC inf. 26. M. Pelaez, Studi di fil. rom. 7, 244.

d = MODENA. B. Estense. Anhang zu D.

f = PARIS. Bibl. Nat., franç. 12472.

a = Le Breviari d'amor de Matfre Ermengaud. G. Azaïs, éd. Béziers-Paris, 1862-81. ()

 

MUSIQUE DES CHANSONS

 

Le ms. G a conservé la musique de nos chansons IX (30,3) et XXV (30,19) ; le ms. R celle de nos chansons I (30,16), III (30,15), XII (30,17) et XXIII (30,23).

Étant complètement ignorant en ce qui concerne la musique, il nous est impossible de fournir à ce sujet la moindre indication. ()

 

NOTES

 

1. F. Diez, Leben und Werke der Troubadours, 2e éd., 1882, p. 103 ; Chabaneau, loc. cit. Chabaneau note aussi que Roger II était vicomte de 1167-1194. ()

2. Il est question d'elle dans un poème attribué à B. de Ventadour (voir l'édition de Appel, p. 348).

Mas molt soi iratz     de la comtessa prezan,
e marritz d'un plai     dona da Burlatz,
en que·l pro de sai     qui perdem, so m'es parven,
avem pres gran dans     si Dieus encar no la·us ren,

et dans Guiraut de Salignac, A vos cui tenc per domn' e per seignor, nous lisons :

Pros comtessa, sobrenom avetz ver,
Car gen burlatz e metetz vostr' aver
E fatz tezaur de fin pretz benestan,
C'autra dompna del mon non val aitan. ()

3. W. Friedmann, Einleitung zu einer kritischen Ausgabe der Gedichte des Troubadours Arnaut de Mareuil, Halle a/S., 1910. ()

4. Voici les vers du Moine où il est question d'Arnaut :

E·l noves Arnautz de Maruoill,
qu'ades lo vei d'avol escuoill,
e si donz non a chausimen
e fai o mal car no l'acuoill,
qu'ades clamon merce sei uoill,
on plus chanta, l'aiga en deissen.
O. Klein, Mönch von Montaudon, 1882 (p. 26). ()

5. Dans un acte de mai 1204 Raimon Roger se déclare « majorem decem et octo annis » (Note de P. Meyer, Chanson de la Croisade, tome II, p. 12). ()

6. Raimon Roger mourut en 1209. Le biographe admet le meurtre du vicomte comme un fait incontesté ; en réalité il y avait deux opinions. A ce propos P. Meyer, op. cit., tome II, p. 46, cite « le témoignage d'Innocent III écrivant au légat que le vicomte avait été « ad ultimum miserabiliter interfectus » comme « la version méridionale de la mort du vicomte ». L'autre version est donnée par G. de Tudèle :

Vers 862

E lo vescoms mori apres de menazon(dyssenterie) ;
E li malvatz tafur(vauriens) e li autre garson
Que no sabon l'afaire co si va ni co non,
So dizo qu'om l'aucis de noitz a traïcion :
E·l coms(de Montfort) no o cosentira, per Jhesu Christ del tron,
Per nulha re c'om sapcha ni sia en est mon
Que hom l'agues aucis.
P. Meyer, op. cit., tome I, p. 40. ()

7. Burlatz : Canton de Roquecourbe, arr. de Castres (Tarn). Adélaïde avait droit au titre de comtesse, parce qu'elle était fille d'un comte.

Jehan de Nostredame, p. 45 de l'éd. Chabaneau-Anglade, a inventé une autre explication du titre C. de Burlatz : « Ce Jehan de Burlas, pour raison de sa femme, qu'estoit filhe du procomte Remond et femme en premières nopces du vicomte de Beziers, surnommé Tailhefer... » ()

8. Friedmann, p. 2. ()

9. Milà y Fontanals, Los Trovadores en España, Obras, II, p. 309. ()

10. D'après une version italienne de la vie d'Arnaut il paraîtrait qu'Arnaut eût chanté plusieurs dames. Il s’agit d'un passage du commentaire de Pétrarque par Gesualdo (éd. 1581, p. 368) cité par M. Friedmann, p. 61 : « El men famoso Arnaldo a differenza di Arnaldo Daniello, i quali duo si come d'un nome cosi furono d'una patria, ma non di conditione nè di fama eguale. E benche fosse questo Arnaldo buon dicitore, non possendone vivere al suo paese, si pose a cercare molte parti del mondo, in ogni luoco cangiando amore ; pur al fine girando prese ad amare ed a cantare la contessa di Burlas figliuola del Pro Conte Ramondo e mogliere del Visconte de Beders, il quale fu nomato Tagliaferro, e n' hebbe honore asai e utilitate. »

Est-ce que Gesualdo suit ici une version aujourd'hui perdue de la vida provençale, ou est-ce une conclusion basée sur le fait qu'Arnaut emploie plusieurs senhals ? ()

11. Milà y Fontanals, loc. cit., p. 309. ()

12. Dans un article de M. P. Boissonnade, L'histoire dans l'œuvre de Marcabru (Romania, 1922, p. 210), nous lisons : « De même qu'Aliénor fut la protectrice de Bernard de Ventadour et de tant d'autres, de même que Richard devait protéger Arnaud de Mareuil... » Au sujet des relations d'Arnaut avec Richard Cœur de Lion, nous n'avons aucun renseignement à donner. ()

13. A. Pätzold, Die individuellen Eigentümlichkeiten einiger hervorragender Troubadours, p. 57 ff., dans Ausgaben und Abhandlungen... E. Stengel, t. 95. Marburg, 1897. ()

14. Le fº 9 contient deux chansons d'Aimeric, le fº 10 en contient une. ()

15. A. Långfors, Les Chansons de Guilhem de Cabestanh, Paris, 1924. Voir les pages iii, iv et 76, et pour le texte, 18. ()

16. Voir Mahn, Werke, p. 153 : Vostre gen cors cuendet e gai... ()

17. Fritz Bergert, Die von den Trobadors genannten oder gefeierten Damen, Zeitschrift für rom. Phil., Beiheft 46, Halle, 1913, p. 20-22. () ()

 

 

 

 

 

 

 

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