1. d'Amor honratz sos senhoratges. Faut-il comprendre d'Amor « par l'Amour », ou voir plutôt dans sos un pronom possessif pléonastique (qui fait double emploi avec d'), dont l'usage est fréquent en provençal ? Cf. Diez, III 3, 66 (et aussi dans Schultz-Gora, Altprov. Elementarbuch 4, p. 125-126, un exemple qui se rapproche de notre texte : so es d'amor sa dreitura).
4. Quom fals remanha. Pour l'omission de la conjonction que, cf. Diez, III 3, 312-314.
15. donas. C'est la leçon de C ; tous les autres manuscrits ont le singulier (que M. Appel a adopé dans son édition, B. von Ventadorn, p. 295). Cependant le vers correspondant dans la poésie d'Albertet est Doncs ben es fols totz hom q'en lor si fia ; et deux vers plus bas, dans notre texte, la strophe commence : La lor amors, qui ne peut se rapporter qu'à notre donas. — Sur les vers 15-16, cf. Wechssler, Kulturproblem des Minnesangs, p. 343.
21. treva. La traduction erronée de Raynouard, Lexique, V, 410, trevas, « tout homme qui avec elles fait paix » a été corrigée par Stichel, Beiträge zur Lexicographie des altprovenzalischen Verbums, p. 81, qui cite la traduction du Donat provençal, 34, 6, trevar .i. frequentare.
23-24. Aimeric reproduit ici, sans aucun changement, le vers de son collègue ; mais la conclusion (v. 24 de chacune des chansons) en est tout à fait différente. Il nous semble que non sap d'amor qe·is leva, doit avoir, dans la pensée d'Aimeric, le sens opposé à celui que lui donne Albertet. M. Appel, B. von Ventadour, p. 297, note 1, propose la correction blasma, pour lauza ; mais il faudrait alors corriger aussi le vers 24 (no·is tanh en si tanh). C'est plutôt sur no sap que devrait porter la correction (p. ex. ben sap, ou qui sap). Tel qu'il est, le vers est obscur pour nous.
27-28. Nous avons adopté la correction proposée par M. Appel, venjes, qui donne un sens bien meilleur que venques. — la pros comtessa fina De Proensa : Béatrice de Savoie comtesse de Provence (1219-20-1246). Elle est mentionnée une seconde fois dans la pièce XIX (392, 26, v. 46). Cf. Schultz-Gora, Le epistole del trovatore Rambaldo di Vaqueiras, p. 23 ; Bertoni, Rassegna bibliografica, p. 144, n. 18 (Giornale storico, XXXVIII, 1901), et Trovatori d'Italia, p. 7 ; Bergert, Die von den Trobadors genannten ... Damen, p. 44-47.
28. on a tota valor : peut-être faudrait-il lire, avec A, que a.. ; sinon, valor est un cas sujet.
29. De Saluza.. N'Ainezina. Fille de Boniface de Saluces († 1212), elle fut fiancée, très jeune, en 1213, a Amédée IV de Savoie, mais le mariage n'eut pas lieu. Elle apparaît pour la dernière fois, dans les actes, en 1219. Cf. De Lollis, Vita e poesie di Sordello di Goito, Halle, 1896 (Romanische Bibliothek, XI), p. 23, note 4 ; Bertoni, Giorn. storico, XXXVIII, p. 143, n. 7 ; Bergert, op. cit., p. 92.
31. La comtessa Biatritz, sa cozina. Beatnce, fille de Guillaume IV de Montferrat († 1225) épousa en 1220, André, dauphin du Viennois. Albertet lui donne son titre, v. 31-32 : comtessa Biatritz sa cozina De Vianes. Elle était en effet cousine d'Agnesina de Saluces, dont la grand'mère était la sœur du marquis Boniface Ier de Montferrat, grand-père de Béatrice de Viennois. Cf. Bertoni, Giorn. storico, XXXVIII, p. 144, n. 17, et Bergert, op. cit., p. 91-92.
— Nous ne comprenons les vers 29-32, qu'en faisant de Biatritz le sujet.
33. Si·l Salvatga es tant pros d'Auramala. Selvaggia d'Auramala, fille du marquis Conrad de Malaspina. Elle n'est connue que par les mentions qu'en font les troubadours. Cf. Schultz-Gora, Epistole, p. 169 ; Bertoni, Giornale storico, XXXVIII, p. 149, n. 57, et Trovatori minori di Genova, p. X, note 3 ; Bergert, op. cit., p. 85 ; Jeanroy, Les troubadours dans les cours de l'Italie du Nord, p. 10-11.
36. sa seror. Nous connaissons, grâce à un autre troubadour le nom de cette sœur de Selvaggia : c'est Béatrice d'Auramala, nommée dans la treva de Guilhem de la Tor, et dans une autre pièce, En vos ai mesa (manuscrit a2, p. 426), du même troubadour, dont les deux envois sont adressés à Na domna Salvatja et à Na Biatris. Pas plus que sa sœur, elle n'apparaît dans aucun document historique. Cf. Schultz-Gora, Epistole, p. 169 ; Bertoni, Giorn. Storico, XXXVIII, p. 144, n. 13, et Trovatori minori, p. X, note 3 ; Bergert, op. cit., p. 85 ; Jeanroy, op. cit., p. 10.
38. fillas d'en Conrat. Conrad I, marquis de Malaspina (Corrado l'Antico, de Dante), né vers 1179-80 et mort avant 1266. Ce sont les deux poésies d'Albertet et d'Aimeric qui nous apprennent que les deux sœurs d'Auramala étaient ses filles. Schultz-Gora, Epistole, pense qu’il y avait deux marquis, Conrad Ier et Conrad II Malaspina ; mais cf. Restori, Per le donne italiane nella poesia provenzale, p. 207, note 1 (Giornale dantesco, IX, 1901, p. 203-208), et Rajna, Un frammento di un codice perduto di poesio provenzali, p. 18-19 (dans Studj di filologia romanza, V, 1889, p. 1-64).
— lo senhor. La plupart des manuscrits ont lor, qui correspond à mon d'Albertet ; mais quel est le sens de lor ? Nous lisons, avec BD et b, lo.
39-40. M. Appel corrige le qui des manuscrits en cui : mais quel est le rapport entre ces deux vers, et les précédents ? E. Cnyrim, Sprichwörter, p. 46, cite, sans autre explication, au chapitre XIV (« Treulosigkeit, Betrug, Täuschung »), n. 778, ferir sotz l'ala, tiré de la poésie d'Albertet. Nous comprenons « celui qui frappera leur amour sous l'aile (=au cœur) = celui qui sera assez fort, hardi, pour gagner leur amour ».
41. la pros dompna de Massa. Torraca, Donne italiane, p. 30, l'identifie — avec réserve — à une Adelasia ou Adelaïde Malaspina, sœur de Guillaume, le protecteur de tant de troubadours. (Cf. Jeanroy, op. cit., p. 9-10 ; Schultz-Gora, op. cit., 165) ; elle épousa Guillaume Pallodi, marquis de Massa, mort vers 1215-1217. On pense qu'après la mort de son mari elle s'était retirée à Villafranca (qui appartenait aux Malaspina ; car Lanfranc Cigala, lié avec ceux-ci, dédia à N'Ailas de V. une poésie, dans laquelle il parle d'une dame qu'il a trouvée à Villafranca). Cf. Bertoni, Giorn. storico, XXXVIII, p. 142, n. 1, et Restori, Giorn. dantesco, IX, p. 206-207.
49-50. La pro comtessa De·l Carret. Torraca, Donne italiane, p. 21, a proposé d'identifier la Contesso del Carret, qui apparaît dans la treva de Guilhem de la Tor, à la fille d'Henri II del Carret, déjà mariée en 1226. Bertoni, Giorn. storico, XXXVIII, p. 146, n. 26, se demande s'il ne faut pas identifier notre comtessa de·l Carret, avec cette dame ; mais il est impossible de se prononcer.
53. M. Appel propose de lire e s'el a ja domna que mal no·il pessa.
58. Li fan. Les manuscrits AB ont li faitz (impératif), qui correspond mieux au vers d'Albertet, adressé directement aux femmes. |