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Sakari, Aimo. Poésies du troubadour Guillem de Saint-Didier. Helsinki: Société Néophilologique, 1956.

234,012- Guilhem de Saint Leidier

I. — 1. Comme En manque dans Da la leçon reste trop courte. Le même fait se reproduit v. 33, dans a1. Au v. 17, l'absence de En a p.-ê. été compensée par le scribe qui aura ajouté lai. Nous avons restitué En partout devant le nom de Guillem. Da lit Disder et a1, Deslier (<Lesdier: métathèse graphique), à la suite d'un Desdier qui a été rayé.
2. Da lit ici, ainsi qu'au v. 9, sompni, tandis que a1 a ici soin, et soing, v. 9. Ces derniers ne sont attestés que pour sonh »chagrin», dans Swb., VII, 818. Avec soing le v. 9 est trop court dans a1. Pour proposer à salvatge le sens de »difficile à comprendre, abstrus», Swb., VII, 451, cite de Lucidarius (Zeitschr. f. rom. Phil., XIII, p. 225):
 
                            L'estil del libre m'es salvagge,
                            Escur, subtil; yeu requier declaragge;
                            Sera·m util expres en mon lenguagge.
 
Ibid., p. 850, Levy traduit so(b)til, dans la même citation, par »subtil, obscur, confus, en parlant du style».
3. Le vers est trop court dans les deux mss., ce qui prouve qu'ils remontent à une base commune déjà corrompue. On peut conjecturer qu'il y faut le vb. somjar; cf. VIII, 50. A côté de somjar alcuna ren, on trouve s. en. alc. ren »rêver de, songer à qqch.»; cf. V, 9 et Swb., VII, 805. Or, En, au début du v. 5, pourrait être régi de somjar: les vers de la cauda dépeignent ce que l'interlocuteur imaginaire a vu dans son rêve, et non pas l'endroit où il dormait. Les deux premiers vers présentent la rime intérieure ier, à la césure. La raison d'être de l'autr'ier est p.-ê. justement l'exigence de la rime; voir notre texte conjecturé. Dans le second hémistiche, em (Da per) bon' (Da bona) esperanza, il y a une syllabe de trop; le scribe aura ajouté bon' de sa fantaisie, pour avoir les sept syllabes qui lui paraissaient nécessaires pour son vers défectueux.
4. salut, »salutation», est subst. fém. ou masc.; voir Swb., VII, 444 s.
7. Dans Da, le vb. est à l'imparf.: feria uns venz. Au lieu d'écrire feri', nous laissons cependant la leçon de a1, feri, telle quelle; c'est le passé simple: nous préférons le passé frais de Da au présent fraing de a1, v. 8. Ferir est ici vb. itr., signifiant »aboutir, aborder» et »aller jusqu'à» (Swb., III, 453). Le sens attesté pour le vb. réfl., »se jeter», irait le mieux.
8. Da reproduit erronément les deux derniers vers de cette strophe à la fin de la cobla suivante; v. 15 reprend le v. 7, corrompu, et v. 16, le v. 8. Vv. 8 et 15, Da lit brondels et a1, ramels; pour éviter la répétition, nous admettons b. au v. 8.
 
II. — 11. Comme les deux mss. au v. 3, Da anticipe ici aussi les vers de sept syllabes de la cauda. Cf. vv. 35 et 43, occupant la place corr. dans les str. V et VI. Swb., VII, 656, s. v. signifi(c)ansa, cite un passage de Suchier, Enfant sage, p. 413, l. 189: E per la mort d'Abel pot esser significada la mort de Jhesu Crist, non d'auteza ni de noblesa, mas a s. L'éditeur note, ibid., p. 420, que a s. signifie sans doute »figurément, métaphoriquement». Chez Guillem, il s'agit de l'interprétation allégorique d'objets vus prétendument en songe; en voici un tableau:
 
lo vergiers = Amors
las flors = domnas d’aut paratge
lo venz = li lauzenjador
lo bruiz = li fals fegnedor
la frascha del ramels = jois novels
l'arbre deguizat de colors = domna qi laissa de s’amor fegnier
la genzor flors qe lo venz briza = domna qe granz crimz baissa
lo surigier = drutz que fan amar dinier
lo falco = drutz valens
 
la flor bell’ e blancha qe vas totas partz respland = domna francha on beutatz e pretz segnoreja
li veltre = malvatz lauzengier fellon
lo lions = gelos bruianz.
 
C'est à cause de ce »livre des songes» que Guillem jouissait de sa réputation d’interprète des rêves chez Nostredame.
12. La construction qui commence par Lo vergiers ... signifianza Es d’Amor continue certainement; il faut donc introduire la prép. de, comme nous l’avons fait: la rime est -ors, non -or! Considérer venz et bruiz comme juxtaposés à frascha et, par conséquent, également comme sujets de cambiar, rendrait le passage insipide.
15. S. v. frasca, Swb., III, 591, traite longuement de ce passage. Ne sachant comment traduire ce mot, il renvoie, d'une part, au subst. ital. et esp. frasca et, d'autre part, au vb. prov. frascar, »déchirer». Guillem, lui, a associé frascha, v. 15, au vb. franher, v. 8. Or le déverbatif régulier est fracha, »cassure, rupture, déchirure» et »perte, dommage» (Swb., III, 576 s.); notre graphie refléterait-elle tout simplement la prononciation -∫-? Reste à savoir pourquoi les rameaux brisés nous changent en de joies nouvelles. Suffit-il de renvoyer à »rupture»? Si le »fin amour», qui »anc no·s frais», se rompt malgré tout, un nouveau commencera. Ou bien Guillem pense-t-il aux bises d'automne et d'hiver qui séparent l'été du printemps à venir?
 
III. — 17. Comme Da ne présente que deux coblas (pour commencer immédiatement la tenson 173, 5), a1 est unicum pour le reste de la pièce. Il faudra ajouter ici aussi le titre En et supprimer lai.
18. Deguizar signifie aussi »défigurer, altérer, rendre méconnaissable ou différent, varier» (Swb., II, 53); cf. v. 25 et Note corr. — mais va naturellement avec deguizat.
20. Pour rétablir le mètre du vers, il faudra ajouter la; l'omission sera due à une présumée haplographie: folla la. On pourrait lire aussi: em folla l'a fait' e.
21-24. Les vers 21 et 29 sont trop courts. Or, surigier est trissyllabe; cf. Petit dict.: soriguier. Il faut rattacher ce subst. au catal. sorigé »crécerelle, émouchet» (ou plutôt »buse, busard») que Meyer-Lübke, REW, nº 8100, tire de soricarius. L'interlocuteur imaginaire de Guillem, expert en fauconnerie, rêve encore de l'astor gruyer et du falco montargi (Swb., V, 313 ne peut attester m. que dans ce groupe), en dehors de la corneille. Les »songes» étant devenus un genre littéraire l'auteur crée lui-même son rêve, en donnant un emblème pour chacune de ses idées; l'ingéniosité réside moins dans l'explication que dans le songe fictif. »The man of the Middle Ages and the Renaissance must have been made conscious of falconry in a variety of ways», estime M. Schutz, dans son importante éd. de Auzels Cassadors, p. 4, en se référant à Wood-Fyfe, The Art of Falconry (éd. de Frédéric II, De arte venandi cum avibus; p. 526, il y a une hiérarchie complète des oiseaux rapaces), et à Lascelles, Shakespeare's England, II, chap. 27. De la fauconnerie traitent encore, entre autres, Bouchet, Recueil de tous les oyseaux de proye, Poitiers, 1567; Charavay, Étude sur la chasse à l'oiseau au moyen âge, Paris, 1873; Engelmann, Die Raubvögel Europas, Neudamm, 1928; Hensel, Die Vögel in der prov. und nord-franz. Lyrik des Mittelalters (Roman. Forsch., XXVI, 1909, pp. 584-670); Navarro, El libro de la montería, es el tratado de venación de Alfonso el Sabio, Madrid, 1878; Pasquali, D'un gruppo di voci prov. designanti uccelli di rapina (Neuphil. Mitteil., XXXV, 1934, p. 3 s.); Savj-Lopez, Trovatori e Poeti, p. 245 (sur les oiseaux dans la poésie et dans la légende); Tilander, éd. de Lapa, Livro de Falcoaria de Pero Menino (Studia neophilol., XII, nº 3). — Guillem oppose les faucons nobles, astor gruyer (cf. falco gruer Ho gentil, car de son mester Li don' om nom per que val mais: v. 375 ss. de Auzels Cassadors; plutôt que »qui vole la grue», gruer signifiera »sylvestre»; cf. Bloch-Wartburg, Dict. étym., et M. Fouché, Romania, LXVII, p. 465 s.) et falco montargi, qui, pos es privatz, a tart s'en fug (Auzels Cass., v. 374), aux vilaines crécerelle, peu estimée à la chasse, et — corneille! Voir Note du v. 29. Nous avons ajouté d(e) devant un (cf. v. 29); l'ordre des mots normal serait: E vi mai: un astor gruer en l'aira d'un surigier. Nous croyons donc avoir affaire à aira, »nid d'aigle», et, par extension, »nid des grands oiseaux de proie»; voir Littré, Dict., I, p. 97. Con = »ainsi que»?
24. Le ms. lit fai zo ni. Comme il y a une syllabe de trop, nous supprimons zo (= son?): far ni est une locution toute faite.
 
IV. — 25. Le ms. écrit domn' en guiza; pouvant signifier, »comme il faut, bien formé» (Swb., IV, 220), en g. est le contraire de deguizat, »dont l'extérieur s'écarte fâcheusement de l'ordinaire, inaccoutumé (au sens péjoratif), difforme» (ibid., II, 53). Une correction en enquiza, de enquerre »requérir, solliciter d'amour», ne s'impose pas.
28. Le ms. semble lire climz, que nous avons remplacé par crim(z), »bruit, rumeur»; clam, »appel, invocation» et »plainte», est tout proche aussi.
29. Voulant mais deniers qu'onor (cf. Bertran de Born, 80, 28, v. 38) des dames complaisent à de mauvais seigneurs, et vice versa; c'est sans doute là le sens des rapprochements que fait Guillem.
 
V. — 35. Notre conjecture ici et au v. 43 ne prétend pas être la seule possible.
39. sei = sai, de saber.
 
VI. — 41. vist 5e pers. passé simple < vidistis.
42. Il manque une syllabe. Notre correction joia est celle qui reste la plus fidèle au ms.; fins jois se présente également aussitôt à l'esprit.

 

 

 

 

 

 

 

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