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Gouiran, Gérard. L'amour et la guerre. L'œuvre de Bertran de Born. Aix-en-Provence: Université de Provence, 1985.

Édition revue et corrigée pour Corpus des Troubadours, 2012.

080,010- Bertran de Born

Strophe I.
Toute la première strophe est construite sur les jeux de mots que permet le senhal de Guicharde, Meillz-de-Be, que d’autres troubadours ont également employé (Cf. p. LXXV). C’est ainsi qu’Arnaut Daniel s’adresse à elle : Na Miells-de-Ben, ja no·m siatz avarga(éd. Riquer, Trovadores, nº119, v. 33) et que Gaucelm Faidit la célèbre : Na Mieills-de-Ben es flors d’enseignamen, dompna de joi, rehina de valenssa, seignoressa d’onors e de beutatz (éd. Mouzat, nº32, vv. 55-57). Outre les jeux que ce senhal permettait sur bon, mielz et meillor, il rencontrait probablement un proverbe : Qui mais pot, mais pren, dont Giraut de Bornelh s’est lui aussi inspiré : Ja sol om dir el reprover que cel que val mais, e melhs pren (éd. Kolsen, nº59, vv. 31-32). Enfin Stimming 3 cite un vers semblable de Folquet de Marseille : Ben deu hom camjar bon per melhor (p. 198).
 
v. 3.
De la même façon, Jaufre Rudel écrit : me don poder, qe·l cor eu n’ai (éd. Riquer, Trovadores, nº12, v. 38).
 
v. 4 : et aor
Il faut corriger la leçon de IKd : c’aor, qui donne un vers hypométrique à moins d’admettre l’hiatus, proche de la cacophonie, serva al.
 
vv. 9-10.
Les manuscrits s’accordent sur ce texte obscur que Levy discute dans S. W. (t. 3, p. 186, escondir 4) ; il prend le verbe escondire au sens de “se refuser à faire quelque chose”, mais ne parvient pas à une solution satisfaisante.
Stimming 1 (p. 251) traduit en note : “car elle aurait tout à fait tort de me refuser la permission (sous-entendu : d’espérer)”. Kastner (O. C., MLR., 1932, nº27, p. 403) donne à escondire le sens de “nier sa faute” : “car envers moi elle ne peut nier qu’elle ne m’ait donné injustement congé”. Il appuie son interprétation sur la razon de la dompna soiseubuda : ela·l parti de si e·il det comjat. Mais si l’on admet qu’on puisse interpréter un passage de chanson à la lumière d’une razon qui n’est pas la sienne, en fait, on n’obtient jamais que l’interprétation du texte par l’auteur de la razon. Donar lezer peut-il signifier “donner congé” ? Après tout, rien n’empêche que ces vers ne s’adressent à Meillz-de-Be et non à la dame qui a trahi Bertran. Enfin, al sieu tort ne signifie pas “à tort” : Levy S. W. t. 8, p. 318, tort 5) indique pour al mieu tort : “Ce qui me lèse, me cause une injustice”. Il me semble qu’une traduction plus proche du texte serait : “elle ne peut se justifier (ou : se dérober) envers moi sans me donner la possibilité de lui causer du mal”. Reconnaissons que le sens est bien obscur et l’emploi de l’imparfait du subjonctif un peu surprenant.
 
v. 19.
C’est là une des qualités traditionnelles de la dame : Cf. Aimeric de Pegulhan (éd. Riquer, Trovadores, nº193, v. 12) : Que ses son dan saup far guays los marritz et Peire Vidal (éd. Anglade, nºXIX, v. 14) : Ab lieis que fa·ls iratz rire.
 
v. 21 : Ja’ questa.
C’est la leçon proposée par IKd, alors que FG indiquent : Aquesta. Je conserve le Ja du manuscrit de base. Bartsch (Chrestomathie provençale, 1868) admet une forme queu parallèle à aqueu (quar de queu frut manget, que deus li devedet – 18, 26-27) et Appel (Provenzalische Chrestomathie, 1920) signale une forme quest parallèle à aquest : sed eu a quest besoin ne vos secor (1. 601). En fait, il est plus simple de supposer que le a initial non accentué d’aquesta ne faisait qu’un avec celui de ja. On rencontre de la même façon chez Gaucelm Faidit (éd. Mouzat) si qu’anc puois no fo’nquezitz (XVI, v. 34) ; me fai’star totjorn pessiu (XV, 8) et même un phénomène semblable chez Bertran lui-même (41.12).
 
vv. 22-25.
Stimming écrit ama·n où le ·n renvoie à une cause assez vague. Thomas préfère le supprimer simplement, bien que cet n se trouve dans tous les manuscrits (p. 115). Appel (O. C., “Beiträge ...” II, p. 39) considère aman comme un participe présent et place entre parenthèses tan aman onor, joven e solatz et amor. Kastner (L. C. p. 404), qu’aucune de ces solutions ne satisfait, propose de voir un nom plutôt qu’un verbe dans acuelh et d’écrire au vers 24 : don a en deux mots (F indique dompna, G : dona, I : dona et Kd : domna). Il est sûr que si acuoill, dona e rete sont sur le même plan, avec grat comme commun complément, la phrase manque de clarté. En revanche, en prenant acuoill comme un substantif à inclure dans la liste des mots qui le précèdent, il ne reste que deux verbes : aver et retener grat, de sens semblables (S. W. t. 4, p. 172, grat 12 et 16). La moins mauvaise solution me paraît de suivre Stimming pour ama·n et de faire d’acuoill un substantif comme l’a proposé Kastner.
 
v. 25 : si conve
Selon Stimming 1 (p. 252), il s’agit d’une brachylogie.
 
v. 46 : veira
Tous les manuscrits, suivis par Stimming dans sa première édition, lisent volra, qui répète simplement le vers précédent. Par la suite, tous les éditeurs ont introduit la correction veira qui paraît nécessaire.
 
v. 52 : Bos
L’emploi du cas sujet là où s’imposerait le cas régime Boson n’est pas déterminé que par les nécessités métriques. En effet, le cas sujet Bos permet d’intégrer ce nom au jeu permanent de ce poème sur cet adjectif, son comparatif et son superlatif.
Ce Boson qui se trouve à Turenne est sans doute Boson III, qui succéda à son père Raimon II en 1191. Selon Kastner (Ibid.), comme Raimon est né en 1143, son fils Boson devait être assez jeune lors de la composition de cette chanson. En conséquence, il propose pour eslire le sens de “deviner, prédire”.
 
v. 54 : estre
Il s’agit ici de la 3º personne du subjonctif présent du verbe estrenar. Martín de Riquer la signale à propos d’un vers de Guillem de Berguedà : si merces d’un dous bays m’estre (O. C. nºXXVIII, v. 45) ; il y ajoute encore un passage de Falquet de Romans : Aquel glorios Dieus ... prec ... d’aitan nos estre (éd. Stroński, p. 111) et un vers de Guilhem Ademar : Qe·m des s’amor e d’un baisar m’estre (202, 9 ; éd. Almqvist p. 132). On peut également citer Gaucelm Faidit (éd. Mouzat, p. 316) : E prec li, e·ill clam merce, qe d’un dels seus bes m’estre et Giraut de Bornelh (éd. Kolsen, nº38, vv. 73-74) : Ab que m’estre De so que l’ai quis.

 

 

 

 

 

 

 

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