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Gouiran, Gérard. L'amour et la guerre. L'œuvre de Bertran de Born. Aix-en-Provence: Université de Provence, 1985.

Édition revue et corrigée pour Corpus des Troubadours, 2012.

080,025- Bertran de Born

strophe 1.
Selon Stimming 1 (pp. 273-4), Bertran veut opposer Alphonse et Richard, mais, à cause de la longueur de la relative, il oublie en route sa construction et commence une nouvelle phrase. C’est également l’interprétation de Clédat (O. C. p. 86) : “On verra bientôt lequel des deux, le vaillant roi de Castille Alphonse ou Richard, aura le plus de chevaliers, car ils vont se les disputer à prix d’or” et d’Anglade (Anthologie des Troubadours, Paris 1927, p. 65) : “qui aura le plus de chevaliers du vaillant roi de Castille, Alphonse (Alphonse III - sic )... ou de Richard ; Richard...” Appel (B. von B. p. 73) comprend : “nous verrons rapidement qui aura le plus de chevaliers. Le vaillant roi de Castille, monseigneur Alphonse, à ce que j’entends dire, viendra et voudra avoir des mercenaires. Et Richard...”
Toute différente est l’interprétation d’István Frank (Trouvères et Minnesänger, p. 96) : “Je veux composer un demi-sirventes des deux rois (Richard Cœur de Lion et Philippe Auguste), car nous verrons bientôt qu’il y aura davantage de combattants par l’apport du vaillant roi de Castille, Alphonse. J’entends dire qu’il vient et voudra engager des mercenaires”. Martín de Riquer (Trovadores, t. II, p. 734) se conforme à cette interprétation.
À mon avis, cette idée du texte se fonde essentiellement sur la remarque de Frank pour qui l’on ne saurait voir en q’ le pronom interrogatif sujet, qui ne s’élide pas (p. 176). Pourtant, dès lors, Bertran annoncerait un demi-sirventés sur deux rois, qui seraient Philippe et Richard, mais il ne serait jamais question de l’un d’eux et le poète s’attacherait assez longuement à un troisième, Alphonse. De plus, si le roi de Castille doit apporter son aide, pourquoi les rois ne sont-ils que deux dans la strophe III ? N’est-il pas absurde d’introduire Alphonse pour l’oublier dès la strophe II? N’est-il pas surprenant que le roi de Castille aille enrôler des mercenaires en Aquitaine, alors qu’en 1183 le roi d’Aragon allait, selon Bertran, y jouer le rôle de mercenaire ? Il paraîtrait plus logique que ce fût Richard qui engageât des soldats sur son domaine, comme il. l’avait fait en Gascogne en 1186.
Kastner (M. R. nº 32, 1937, p. 210) se demande s’il ne serait pas possible, en supprimant la virgule placée par Appel à la fin du vers 3, d’interpréter : “Bientôt nous verrons qui (Richard) aura plus de chevaliers que le vaillant roi de Castille, monseigneur Alphonse, car j’entends dire qu’il (Richard) vient et voudra des mercenaires.” Le critique préfère finalement conserver la virgule et comprendre : “car j’entends dire que le vaillant roi de Castille, Alphonse, vient et voudra des chevaliers.”
Compte tenu du fait qu’on rencontre l’élision du pronom interrogatif sujet en 43. 2 (cf. note à ce vers), je pense qu’il faut reprendre la solution évoquée, puis écartée par Kastner : “Nous verrons bientôt qui (Richard) aura plus de chevaliers que le vaillant roi de Castille, Alphonse, car j’entends dire qu’il (Richard) vient lever des mercenaires : Richard dépensera...” etc. Désormais, le texte n’offre plus de difficultés : il n’y est pas un instant question de Philippe Auguste, ce qui est normal dans la période qui sépare le couronnement de Richard de leur départ en commun pour la croisade, puisque leurs relations étaient assez bonnes.
 
v. 7 : s’afiansa
Stimming et Thomas lisent fiansa, et le glossaire de Thomas indique : “trêve” ; Levy (P. D. p. 190) propose : “confiance ; serment : hommage ; garantie, caution ; garant”. Martín de Riquer traduit par “juramento”. Appel (Lieder) lit afiansa qu’il interprète par “Sicherstellung”, “fait de mettre en sécurité, garantie”, alors que Levy (Ibid. p. 9) ne connaît pour ce mot que le sens de “traité”. Frank (Ibid.) traduit d’ailleurs le passage par “pactiser”. Kastner (L. C. p. 211) préfère adopter fiansa au sens de “serment, parole donnée”, mais précise que l’on peut accorder la même signification à afiansa. Il pense que sa ou s’ peut être rapporté à Alphonse aussi bien qu’à Richard.
 
v. 8.
Le même couple apparaît chez Peire Vidal : Mi temon plus que cailla esparvier (éd. Anglade, nº 14, v. 4), Peire Cardenal : Frances Bevedor Plus que perdits ad austor No vos fan tenensa (25. 47) et dans Girart de Rossillon (vº 1506) : Non es nulhs om plus duhs de bataliers, Ni de la calha penre nulhs esparviers.
 
vv. 20-24.
Cf. pp. XXXIV-XXXV de l’Introduction. Selon Frank (Ibid. p. 176), tolre (v. 20 et 24) signifie “dérober, piller, voler” et jorn (v. 22) veut dire “dans une phrase négative : jamais”. Enfin, pour saumiers (v. 21), le sens de “bête de somme” est confirmé par la Chanson de la Croisade Albigeoise (éd. Martin-Chabot, laisse 159, v. 70) : Et a dit a sos omes que descargo·ls saumers.

 

 

 

 

 

 

 

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