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Gouiran, Gérard. L'amour et la guerre. L'œuvre de Bertran de Born. Aix-en-Provence: Université de Provence, 1985.

Édition revue et corrigée pour Corpus des Troubadours, 2012.

080,016- Bertran de Born

v. 1 : Fuilhetas
Alors que le folio 232 du même manuscrit M indique Fuilheta dans notre pièce nº42, dans cette chanson ce nom apparaît au pluriel à deux reprises. Appel (“Beiträge II” p. 55) fait remarquer qu’au vers 12, il n’est pas question que d’un jongleur, mais aussi de sa “tribu” et le uns no·n passet du vers 14 suppose assurément plusieurs personnes. Or, dans la chanson, l’accord se fait au singulier (v. 15) ou au pluriel (vv. 3 et 4) selon les besoins de la rime : doit-on en conclure, comme le pense Appel que Bertran s’adresse parfois au chef d’une troupe et parfois à la troupe tout entière, ou que, le nom Fuilhetas étant au pluriel l’accord se fait soit avec le nom soit avec la personne ? À mon avis, tout ce qu’on peut dire, c’est que les règles ne sont pas strictement appliquées dans ces amusements que sont les sirventés aux jongleurs.
 
v. 12.
Ms. con vos e vostra siata. Stimming 1 écrit : e vostr’asiata (p. 157), mais il indique en note (p. 262) qu’il ne peut citer d’autre exemple de ce mot qui, d’après le contexte, devrait avoir le sens de “tribu, groupe, espèce” et il pense qu’il faut vraisemblablement lire esclata. Pour Chabaneau (R. L. R. nº31, p. 606), “ce mot paraît être un substantif collectif se rattachant à ais, demeure, lieu qu’on habite ; la désinence ata, à la vérité, fait difficulté ; on voudrait ada, comme dans maisnada = *mansionata ; mais cf. vita, pour vida.” Thomas (p. 136) écrit en vostre assiata et note dans son glossaire le sens de “assiette, demeure”. Appel (Lieder p. 30) propose de lire e vostra’scata et indique dans son glossaire : “escata, esclata : Sippe”, solution adoptée par- Kastner (M. L. R. nº29, 1934, p. 143), parce qu’elle a le mérite de ne changer qu’une lettre au texte du manuscrit. Je ne vois pas d’autre possibilité pour le moment que ce ‘scata.
 
v. 14 : lata
Raynouard (L. R. t. IV, p. 25) traduit par “limite” ; Chabaneau, se fondant sur le Périgourdin “lato feulho, les planches minces qui supportent la toiture et qui s’avancent plus ou moins au-delà du mur”, propose “le rebord du toit” (L. C.) ; Thomas, que je suis, indique : “latte servant de clôture”.
 
v. 19 : barata
Stimming 3 propose de traduire ce mot par “gagner”. Appel, avec une argumentation solide (Ibid. p. 46), préfère lui donner le sens de “agir, se comporter” qu’admet également Kastner. Le vers 20 et les adverbes qui modifient ce verbe rendent à mon sens difficile d’adopter, avec M. Ehnert (O. C. p. 25) le sens ordinaire de “frauder”.
 
v. 20 : alinhat
Appel (Ibid. p. 35) pense qu’il faut comprendre “adroit et bien fait”, comme pour l’afr. alignié, utilisé principalement pour la forme du corps, au sens de “droit, bien fait, adroit”.
 
v. 22 : Na Tempre
Cf. pp. LXXVIII-LXXX de l’Introduction.
 
v. 25 : sahus aficat
Pour Chabaneau (R. L. R. nº32, p. 207), “Métaphore qui paraît prise de la chasse à la pipée, où le chasseur fait “glatir” un appeau, de sureau (sahuc) ou d’autre bois fixé (afichat) de manière à ne pas bouger”. Il me semble plus probable que le sahus soit le limier (cf. Anglade, Grammaire ... p. 48, note 2 qui donne à ce mot l’étymologie de Segusius (canis), chien originaire de Suse et le F. E. W. XI, 414 qui attribue à ce mot une origine gauloise).
 
vv. 29-31.
Le nom de Damiata interdirait, selon Clédat, d’attribuer cette chanson à Bertran, puisque la ville de Damiette en Orient n’est devenue célèbre qu’à partir de la croisade de 1217-1221. Cette objection ne disparaît pas, si l’on pense, avec Chabaneau, que “Leucate et Damiate sont deux villes de France assez voisines, la première dans l’Aude, la seconde dans le Tarn (sur l’Agout)”, puisqu’il semble bien que la ville albigeoise ait reçu son nom de la ville égyptienne. Mais, après tout, depuis que, entre 1163 et 1169, le roi de Jérusalem Amaury avait envahi cinq fois l’Egypte, Bertran pouvait bien avoir entendu parler de Damiette dès avant la IVe croisade. En fait, ces villes sont citées pour permettre au troubadour un à peu près comme Fanjau dans la pièce nº2, mais quel en est le sens ? Peut-être la forme adoptée par le copiste doit-elle nous orienter vers Leu cantar (lieu chanta), qui signifierait : “je n’ai plus le chant facile”. Chabaneau propose de comprendre leu catar, sans indiquer le sens qu’il donne à ce dernier mot, sans doute celui de cazer, que Kastner interprète : “le lieu où les choses tombent facilement”. Le sens de Damiata est plus évident, c’est le lieu où l’on trouve dommage. Quoi qu’il en soit, on trouvera un procédé du même genre chez Peire Cardenal (éd. Lavaud, nº31, vv. 33-35): Aquist ric home non son ges de Valensa Anz son de Gap e d’Albrac, deforas Fransa ; De Bauzac e de Cruas es lur semensa où les noms de lieux signifient respectivement, selon l’éditeur: “valeur, jactance, boue, franchise, tromperie et cruauté”.

 

 

 

 

 

 

 

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