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Gouiran, Gérard. L'amour et la guerre. L'œuvre de Bertran de Born. Aix-en-Provence: Université de Provence, 1985.

Édition revue et corrigée pour Corpus des Troubadours, 2012.

080,018- Bertran de Born

v. 3 : ras
Thomas n’indique que le verbe raire dans son glossaire. Cela me paraît plus vraisemblable que le sens de “pimpant” ou de “bien nourri” que propose Levy (S. W., t. VII, p. 35).
 
v. 4 : guirlanda
La guirlande de fleurs semble être le symbole de la paix. Stimming 1 cite Sordel (34 , 20) : Pus ven la patz el gais temps de pascor, Si deuria mostrar ab guirlanda de flor. C’est ainsi que Peire Cardenal reproche à un seigneur de festoyer : Mentre que porta garlanda (éd. Lavaud, nº25, v. 24) et que Montanhagol s’en prend lui aussi aux Anglais : Engles de flor Faitz capel o de fuelha. No·us detz trebalh, Neis qui·us assalh ...
 
v. 8.
Il est curieux de voir comment l’univers se retourne d’un Bertran de Born à celui que je crois être un autre : désormais, c’est Richard qui est accusé de mollesse, alors que le mérite guerrier revient à Philippe. Il est vrai que ce Bertran-là devait passer du côté de Philippe Auguste, comme le montre un acte signé à Nemours en novembre 1212 où le roi de France reçoit l’hommage du comte Archambaut de Périgord et de Bertran de Born, seigneur d’Hautefort, et s’engage à ne détacher de la couronne ni le comté de Périgord ni la forteresse d’Hautefort (cf. L. Delisle, Catalogue des actes de Philippe Auguste, Paris 1856, p. 320).
 
v. 10 : gas
Selon Suchier (Lit. Blat. nº4, 1880, p. 142), gas est la forme française de gaps. Suchier fait remarquer que Bertran utilise parfois des formes françaises à la rime : Frederis (35. 49), Enris (35. 50), enemi (34. 23), estor (37. 33) et dans des citations : sor (29. 29), Guilelme (5. 41), aïa (12. 42).
 
v. 11 : pas
Raynouard traduit : “Quand il ne tire point cheval du pas”, et c’est sans doute le sens que Thomas donne à ce passage, puisqu’il écrit (p. 98) : “allusion probable à la mésaventure militaire arrivée à Richard à la bataille d’Aumale (août 1196), où le roi d’Angleterre fut renversé ainsi que son cheval & où il faillit rester aux mains des Français”. Le sens exact serait alors : “Quand il ne tire pas d’affaire son cheval”, mais n’est-ce pas tirer un peu abusivement le sens de pas ? Je préfère comprendre traire de pas par “faire abandonner le pas à son cheval”, c’est-à-dire lui faire abandonner l’allure de la promenade pour celle de la guerre. Peut-être le texte de M : del pas conviendrait-il mieux à cette interprétation ?
 
v. 12 : randa
Le sens de “arranger” est admis par Raynouard (L. R. t. V, p. 41) et Levy (P. D. p. 314), mais Thomas l’accompagne d’un point d’interrogation dans son glossaire. Stimming 1 propose “fixer, consolider” ? Stimming 3 “nettoyer” et Diez “orner, décorer”. Levy (S. W. t. VII, p. 30), qui donne à ce verbe le sens général de “mettre en ordre, en état, préparer”, écrit que le sens de “faire briller, enlever la rouille” conviendrait bien au passage. Il me semble que c’est là adapter un peu trop le sens du mot au contexte et le sens général de “préparer” me paraît convenir. Les vers d’Amanieu de Sescas : ... aprestatz / sa raub’ans que·us o man ; / et aporta·l denan, / ans que·s leu del costil, / agulh’ e sed’e fil, / com se puesca randar (éd. Sansone, texte IV, vv. 154-9) et E can s’er gen randada (v. 173) que l’éditeur traduit par “abbigliarsi” et “abbigliata” admettent parfaitement le sens de “préparer”. Celui de Cerveri de Girone (éd. Martín de Riquer, nº22, v. 7 : a la gencer que·l mon se vest e·s randa, que l’éditeur traduit par “a la más gentil que en el mundo se viste y se adorna” admettrait fort bien le sens de “revêtir”.
 
v. 13.
La formulation de M : el reis fes qe coraios est plus habituelle que celle de IKd.
 
v. 16.
Il est impossible de conserver la leçon de IKd : S’es tals la fis com lo comensamen qui présente une faute de flexion.
 
v. 20 : ni
Stimming 1 écrit : n’i et Thomas : ni. Je crois, avec O. Schultz-Gora (“Zu prov. ni” in Zeitschrift nº33, 1903, p. 231) que i = ibi ne semble pas ici imprescindible.
 
v. 22 : reis
Il s’agit du roi d’Angleterre, Richard, et de son frère Jean, qui portait le titre de comte de Mortain.
 
v. 23.
On rencontre ce proverbe chez d’autres troubadours, comme Peire Vidal (éd. Anglade, nº34, v. 50) : Mas qui men no ditz ver.
 
v. 25 : garanda
Levy (S. W. t. IV, pp. 42-3) propose d’interpréter ce mot dans notre passage par “la juste mesure, ce qui convient”. For de garanda a donc approximativement le sens de “de façon inconvenante” .
 
v. 27 : san Tomas
Selon Thomas, il est ici question de saint Thomas de Cantorbéry qui sert à désigner l’Angleterre : Uns coms de san Tomas signifie simplement un comte anglais. “Le personnage ainsi désigné ne peut guère être que Ranulfe, comte de Chester, que le roi Henri II avait marié à Constance, veuve de son fils Geoffroy, duc de Bretagne. Les Bretons le chassèrent à la mort d’Henri II ; grâce à Richard, il revint en Bretagne en 1196 & réussit par surprise à faire prisonnière sa femme Constance à Pontorson”.
 
v. 28 : Breselianda
Comme dans le sirventés nº11, la forêt de Brocéliande sert à désigner le comté de Bretagne.
 
v. 31 : Artus
Le thème de l’espérance bretonne est ramené à des dimensions plus modestes : il s’agit ici du jeune héritier de Bretagne dont Français et Anglais se disputaient la garde.
 
v. 35 : passon lo pas
Raynouard (L. R. t. IV, p. 440) traduit ce mot par “détroit” ; Stimming 3 indique en note (p. 214) : “faire le pas décisif”.
 
v. 39.
Ce vers est hypermétrique dans tous les manuscrits : No (Non M) voill intrar (intrerai M) en gerra (gu- I) ni en conten. On peut corriger en écrivant ni conten ou ni·n conten. La seconde solution, qui préserve le parallélisme, me semble préférable.
 
v. 40.
“En 1197, Richard gagna à sa cause un certain nombre de barons français, notamment le comte de Flandres & Renaud de Dammartin, à prix d’argent ; ce sont eux, ou ceux qui voudraient les imiter, que le poète met en garde contre la nonchalence du roi d’Angleterre” (Thomas, p. 99, note).
 
v. 42 : Ugos
Selon Stimming 3 (p. 214), il s’agit d’Hugues IX de Lusignan, surnommé le Brun, dernier comte de la Marche, qui se trouvait dans l’armée de Richard quand celui-ci envahit la Bretagne et avait été choisi par le roi pour faire face à une attaque de Philippe. Bertran exprimerait l’espoir qu’il ne se laisserait pas acheter par les Français. Un point rend cette interprétation contestable : selon Thomas, Hugues ne porta le titre de comte qu’après la mort de Richard.
De plus, il existe d’autres comtes de ce nom. Ainsi, Dom Vaissète (O. C. t. VI, p. 168) note une donation faite à l’abbaye de Conques en 1195 par Hugues de Rodez et son fils, qui lui succéda de son vivant sous le nom d’Hugues III et mourut dès 1196. Le fait qu’un Hugo, comes Rutenensis, frère de l’abbé Guillaume de Dalon, figure dans un acte du cartulaire de cette abbaye (copie Baluze, p. 33) permettrait d’établir un rapprochement entre les comtes de Rodez et la famille de Born.

 

 

 

 

 

 

 

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