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Gouiran, Gérard. L'amour et la guerre. L'œuvre de Bertran de Born. Aix-en-Provence: Université de Provence, 1985.

Édition revue et corrigée pour Corpus des Troubadours, 2012.

223,005a- Bertran de Born

v. 2.
Cerveri de Girone (éd. Martín de Riquer, nº82 : lo vers de cels que fan perdre el mon), dans une sorte d’enueg, conclut chaque strophe par ce qui lui semble la plus grande déchéance : l’ascension sociale des serfs : e mays can servs esdeve poderos (v. 6), e pus can servs es pausatz sobre·ls bos (v. 12), e mays can servs adutz subjeccios (v. 18), e pus can servs jutya e damna·ls pros (v. 24) et e seyner servs de seynor sofratxos (v. 30).
 
v. 7 : acaptar
D’après O. Schultz-Gora (Lit. Blatt für g. u. r. P. nº8-9 1911, p. 294), le sens de “demander, mendier” est trop fort pour les divers passages où ce verbe est attesté et l’on devrait se contenter de “gagner, se procurer”. Il me semble que ce passage demande un sens plus précis, qui correspond assez bien à la définition donnée par Godefroy pour l’afr. acheter : “obtenir avec peine et difficulté”. Le sens de “mendier” est confirmé par le catalan : Pompeu Fabra (Diccionari general de la llengua catalana, Barcelone, 1962) indique : “acaptar : demanar, recoillir (almoines) per a un objecte piados”.
 
v. 13 : l’entremueia
5timming, Thomas et Bartsch suivent le manuscrit R : la tremueia. Levy (Lit. Blatt. nº6, p. 235, 1890) pense que la forme de C n’est pas à rejeter et renvoie au Tresor de Mistral : “Entremueio, tremueio : trémie de moulin ; auge de bois pour faire manger les poules ... metre de blad dins l’entremueio : verser du blé dans la trémie ; remplir son ventre”. Levy (P. D. p. 154) indique simplement : “entremoia : auge”. On peut penser que entremueia au sens de “auge” reprend le vers 9 : costum de trueia, mais il serait aussi possible de donner à ce mot le sens de “trémie, entonnoir de moulin”, puisque l’auteur nous a dit que les vilains sont réduits à acaptar lur pan, à moins que nous ne soyons déjà en présence de la métaphore signalée par Mistral et que tener vueia la tremueia signifie tout simplement “affamer”.
 
v. 17.
Peire Vidal (éd. Anglade, nº42, vv. 33-40) exprime des sentiments analogues : Catalan et Aragones An senhor honrat e valen E franc e larc e conoissen Humil et ardit e cortes. Mas trop lais enmanentir Sos sers, cui Deus bais et azir ; Qu’a totz jorns estan en agag Per far en cort dan et enpag.
 
v. 22 : tan
Stimming 1 (p. 178) admet pour cet adverbe le sens de “très”. Stroński (O. C. Elias p. 142) rappelle que tan absolu et sans exclamation ne paraît pas exister en occitan médiéval. Il suggère d’interpréter tan comme se rapportant au vers 20.
 
vv. 28-32.
Il manque un vers à chacun des manuscrits, ce qui rend malaisée la compréhension de la strophe. Dans C, Quar vilan si dieus mampar. per planher ni per complanher. nulhs hom nol deu aiudar. enans deu lo fag refranher, nous trouvons simplement la répétition de la condamnation, mais à la différence des deux strophes précédentes, on ne rencontre pas de justification de la punition réclamée. Dans R, Car vilan si dieu me gar. a sel que pus li pot tanher, no vol del sieu aiudar. per com deu sos faitz refranher, au contraire, le pillage des biens du vilain est justifié par son avarice, capable d’étouffer même la voix de la nature. Comme la version de R me paraît de beaucoup la plus satisfaisante, j’ai ajouté au texte le vers 29 qui manque à C et corrigé les vers 31-32 en suivant R. À propos du vers 29, je partage l’opinion de Stroński (O. C. Folquet, p. 227) qui note que dans aiudar a cel que li tanh on a affaire à un masculin et non à un neutre, ce que confirme ce vers de Cerveri de Girone (éd. Riquer, nº45, v. 21) : e dic a tal qui no·m tayn ne paren que l’éditeur traduit par : “y hablo con quien no es de mi familia ni mi pariente”.
 
v. 33 : Rassa
Sur le modèle de notre pièce nº1, Stimming 1 et Bartsch (Chrest.) ont voulu voir ici le senhal de Geoffroy de Bretagne. Le texte exige que les adjectifs vilana, tafura et plena se rapportent à un substantif féminin qui ne peut être que Rassa, qui doit donc être un nom commun. Chabaneau (R. L. R. nº31, pp. 608 -9) écrit : “Je pense avec M. Tobler que ce mot ici veut dire race, et c’est ainsi que Thomas le traduit dans son glossaire”. Mais ce mot n’existe pas au moyen âge (cf. Grober, Ztschr. 9, 557-8). Suchier pense que le mot rassa, traduit par conjuratio par le Du Cange conviendrait bien ici et Stimming 3 indique ce sens dans son glossaire, tout en l’accompagnant d’un point d’interrogation. Levy, qui n’accueille pas ce mot dans son Petit Dictionnaire, se demande (S. W. t. VII, pp. 36-37) si l’on ne pourrait pas tirer le sens de ce terme jusqu’à “ramassis”. W. von Wartburg (F. E. W. t. X, p. 111) indique : “apr. rassa, f. ‘bande d’individus qui se sont concertés dans un certain but ; complot, conjuration, convention secrète”, puis ajoute plus loin (note 38, p. 117) que chez Bertran de Born, ce mot à le sens de “bande”, tant dans le senhal que dans le passage qui nous intéresse. Selon Wartburg, le fait que Bertran ait employé ce terme comme senhal ne l’aurait sûrement pas empêché de l’utiliser comme nom commun. Ce sens me paraît assez satisfaisant pour ne pas penser que le copiste ait pu commettre une erreur. Andresen supposait ainsi qu’il s’agissait du mot raca = “rosse” ; on aurait pu songer de même à raca = “épidémie” (Levy, P. D. p. 312) ou rasca = “teigne” (Ibid. p. 314). Rappelons qu’on rencontre, à la fin de la strophe III de Pois Ventadorns de notre poète, deux vers supplémentaires dans le ms. C : Et a Bordelh pot remaner la rassa Et vas Peitieus dressent los guomfainos où le mot rassa a sans doute un sens péjoratif.
 
v. 39.
La même idée apparaît dans lo vers leuger de Cerveri de Girona (éd. Riquer, nº56, vv. 27-30) : no·m tenray non estenda / prezic menan clamor / dels pus apoderatz / c’Adam volon semblar.

 

 

 

 

 

 

 

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