v. 1. Cf. Giraut de Bornelh : Mas, com m’ave, Deus m’aiut, Qu’era, can cut chantar, plor ?, XXI, vv. 1-2, éd. A. Kolsen, I, 106.
v. 13. De la même façon, Peire Cardenal écrit dans son sirventés : C’anc peior gent non vic, XXIX, v. 64, éd. R. Lavaud, 174. On lit encore dans des poésies anonymes : Bona genz, veias cal via Nos va clerzia mostran : Malvestat e luiuria, Trafec, barat et enguan, vv. 1-4, C. Appel, Prov. Ined., 321, et Sell qe degron eser pastor E dreturier presicador De la lei nostre segnor, Son li primier comensador Del mal e de la follia, Per c’an tut lo mon turbat Et de Dieu e de sa via Tut lo segle desviat, vv. 1-8, ibid., 322.
v. 15 : un tal. Le texte du ms. de base peut être conservé, car on trouve parfois l’article indéfini devant un nom accompagné d’un adjectif indéfini. Exemples. Peire Cardenal : Una ciutatz fo, no sai cals, On cazet una plueia tals Que ... LXXX, vv. 1-3, éd. cit., 530 ; Bertran de Born : Et ai apres un’aital art Que ... XVI, vv. 3-4, éd. cit., 302.
v. 17 : plais. Cette forme n’est pas impossible puisque, pour ce verbe, plas et plai sont attestés à la 3º personne du prés. de l’ind. ; v. Bartsch, Chrest., 608a.
v. 18. La leçon de c (per primer passage) donne un vers hypométrique. Pour la corriger, faut-il suivre T (per lo), M (per q’al) ou CR (per qu’el) ? En bonne règle, on devrait adopter la leçon de T, ms. le plus proche de c. Mais elle présente le considérable défaut de supprimer toute liaison logique avec les propositions précédentes. On a fait confiance à M : il emploie la préposition qui convient le mieux au sens ordinaire du mot passage ‘traversée’. Le copiste de c connaissait d’ailleurs un ms. du groupe CMR; v. ci-après la note au v. 44.
Il s’agit ici d’une allusion à la quatrième croisade (1202-1204).
v. 23 : lugor. Des leçons fort différentes s’opposent. Si on laisse de côté celle du ms. M, isolée : qe nueg ni jorn non han legor qe sapchon en ren avenir, on rencontre dans le groupe CRT : quels (qe·igll T) an huels (uogill T) e non an lugor (lusor T) et dans c : q’il ant oilç on non a lugor. Dans le groupe indiqué, le sens serait : ‘ils ont des yeux et ils ne voient pas’, tandis que pour c il faudrait comprendre: ‘ils ont des yeux là où il n’y a pas de lumière’. Cette dernière interprétation ne saurait convenir, car le vers renvoie évidemment aux paroles de la Bible et d’autre part il ne cadre pas avec les vers suivants du même ms. c : Q’en re non sabont avenir Qe sia d’agradage. On peut objecter que le sens de ‘vue’ pour lugor n’est signalé par Raynouard que pour notre passage : le dictionnaire de ce savant est probablement la source du FEW, qui donne à son tour, pour apr. lugor, ‘vue, faculté de voir’, V, 437a. Mais ce sens est confirmé par celui que peut prendre le correspondant de langue d’oïl lueur. Tobler-Lommatzsch V, 740 cite en effet ce passage d’E. Deschamps : Thobie perdit sa lüeur, Mais sa femme lui fut aidable (Miroir de mariage, IX, 12, 252). Dans ces conditions, on a corrigé en suivant le groupe CRT.
vv. 33-35. Le copiste de c a écrit : q’al avols tolgues la richor e no·il laisses terra tenir e dones l’eritage a tal qi fos, ce qui rend une correction nécessaire. Plutôt que de suivre les mss CMRT, qui indiquent un pluriel : als avols (auls T) ... e no·ls (ni no lur T, e fezes la·ls pros M), il paraît plus économique de mettre un singulier en rapport avec le pronom indéfini singulier tal du v. 36, ce qui correspond d’ailleurs au texte du ms. Q : q’al mavaz ... e no·il ... a cel qe. P est incohérent : als avols ... no·i ...tal ... pro. Sg a tenté de tout mettre au pluriel : als malvais ...no·i ... tals, mais les nécessités du vers l’empêchent de pousser plus loin. On se borne donc à corriger en avol.
v. 37. Cette croyance en un début du monde où puissance et mérite allaient de pair est un cliché que l’on rencontre chez d’autres troubadours et elle peut fournir un argument au vœu d’une nouvelle distribution. C’est ainsi que Giraut de Bornelh écrit : Donc cals drechs O acolh Que·l filhs ai’atretan De rend’e·l pretz soan Ni cals razos adui Que melhs no tanh’altrui ? Qu’eu cre que fos enans Oltra mil ans C’onors e senhoratges Davon pretz e coratges E costas e trebalh, E·l filhs, si·l melhs trassalh, Non es donc forlinhatz ? Era com no mostratz, Vos savis, que jutjatz, S’als pros fo·l dos donatz, Com er dels desprezatz ?, XLII, vv. 35-51, éd. A. Kolsen, I, 248.
vv. 38-39. La construction de ces vers est un peu lâche puisque, après une série de verbes qui ont en commun pour sujet le seigneur supposé, le dernier verbe au subjonctif mudes dépend du sujet hom. C’est pourquoi le copiste de M a remplacé ce mot par totz, supprimant ainsi la difficulté. Celui de Sg poursuit simplement la série : Mas aisi camjes lo riche malvatz.
v. 40. Aux leçons de CR : Si cum (co R) fan Lombart (-tz C) poestatz et de MQSg : Com (-n M) fan Lombart (Lob- Q, -tz Sg) lor (las M) poestatz (-az Q), s’oppose celle de PTc : Si com fai prior (-s P) et (e P) abaz (Pc), Ansi com peior abatç (T). Plutôt qu’à une erreur de copiste, on peut songer à une double édition : en effet, si la comparaison avec les Lombards était intéressante pour un public occitan, elle n’offrait assurément rien de neuf au public d’Italie du Nord. De plus, la comparaison de PTc paraît plus exacte : si les podestats ne sont élus, en principe, que pour un an, il n’en va pas de même pour les prieurs et les abbés, qui, comme Falquet souhaitait qu’on fît pour les malvatz rics, peuvent être déposés en cas d’indignité. On a donc suivi le ms. de base en corrigeant avec P en priors qui doit être au même cas et au même nombre que abaz. Il semble que Lacurne de Sainte-Palaye, Histoire littéraire des troubadours, publiée par l’abbé X. Millot, Paris 1774, ait connu un ms. du groupe PTc, puisqu’il écrit : “Que ne change-t-on les mauvais princes, comme les abbés changent les prieurs ?”, I, 463.
v. 44. Le copiste du ms. c écrit venc, comme son parent T, mais il ajoute à côté alias volc, et volc est la leçon, à notre avis préférable, des mss CMR.
vv. 47-49. Nous comprenons : l’homme ne peut espérer son salut si le spectacle de la Passion ne lui donne pas le courage de vivre selon sa foi, et en particulier de se croiser.
vv. 51-52. Au v. 31, c indiquait déjà agessen pour agessem et il récidive au v. 51 avec deurian pour deuriam, ce qui l’entraîne à écrire au v. 52 sabon pour sabem. Comme des sixièmes personnes excluant l’auteur de son propos paraissent peu probables, on suit le ms. T qui, s’il indique lui aussi deurian, donne bien sabem. La 4º personne paraît garantie par les adj. pos. nostr’ des vers 53 et 55. |