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Français
Jean Mouzat

[SANS ATTENDRE LE MOIS DE MAI, LE POÈTE CHANTE LA VERTU AGISSANTE DE L’AMOUR]

I. J’avais cru cesser complètement de composer des chansons en ce temps d’hiver, et cela jusqu’au premier jour de mai ; mais maintenant je vois que je ne dois pas m’abstenir, parce que la matière que j’ai est plus gracieuse et gaie, et aussi à cause de la joie qui me vient de mon Plus Avenant ; car je vois que son mérite toujours grandit et avance, et pour cela je sais sans nul doute que ma chanson doit en être plus brillante, pour la seule raison qu’il lui plaît que son beau nom s’y trouve.

II. Vers ma dame j’envoie mes prières en tout temps, puisqu’elle m’a doucement blessé au cœur, sans coup de lance, d’un regard de ses yeux amoureux, le jour qu’elle me donna son amour et son accointance ; et ce regard m’est entré si tendrement dans le cœur, qu’il revient me combler ; et, si avec ses yeux elle m’a fait une courtoise plaie, bien courtoisement elle a su m’en guérir, et je dois le reconnaître et lui en savoir gré.

III. Que jamais ma dame ne croie que le me détourne d’elle pour aller ailleurs, ni qu’un autre amour me tourmente et me possède ; car plus je contemple une autre dame, moins j’ai de désir, car ma dame me le retire ; au nom de Miséricorde et de Sagesse, je la prie qu’elle ait souci et mémoire de moi ! Et si je ne la vois pas, qu’elle n’en ait pas de peine, car je suis si pensif et si soucieux que toujours je garde attachés sur elle mon cœur aussi bien que mes yeux !

IV. Elle est si belle, et de manières si gracieuses, celle que je chante, que, lorsque j’y réfléchis, de mes yeux songeurs je ne vois point de dame qui puisse l’égaler en beauté, et c’est pour cela que je suis gai et que j’ai le cœur joyeux, [tout autant que si l’on me donnait Blaye,] quand je considère qu’une si riche aubaine m’échoit ; et je pousse souvent maint soupir d’angoisse parce que je ne puis tous les jours jouir d’elle en lui donnant des baisers.

V. En Amour sont fixées toutes mes pensées, de sorte que je ne puis les en enlever pour les porter ailleurs, car le n’ai été crée que pour faire et pour dire tout ce qui plaît et agrée à ma dame ; je me donne à elle et lui rends doucement cent mercis, d’un cœur humble, et avec une humble mine ; et je lui rends grâces de la joie et de l’allégresse qu’elle m’a données, si aimablement qu’elles ne se brisent ni ne se défont, et pour cela je reste allègre et joyeux.

VI Nul homme ne peut, sans amour, bien faire et réussir, car alors il ne tourne pas son esprit vers la joie et l’espérance, et car la joie d’Amour est si parfaite et si suave que, contre lui, il n’y a jamais de bien être, et que par l’Amour un homme garde son cœur plus aimable ; il s’améliore, fait effort et essaie d’avoir du mérite, et la vraie valeur ; et ainsi un homme cherche plus volontiers à chevaucher, s’armer, donner des réceptions, faire des largesses et servir.

VII Première version

Au lieu de moi-même, j’envoie ma joyeuse chanson, Linhaure, là-bas où je ne puis me rendre, à Santongier pour l’apprendre et la dire.

VII Deuxième version

Au lieu d’un ami, j’envoie ma joyeuse chanson là-bas à Linhaure près de qui je ne puis me rendre, mais le chante un vers pour qu’on l’apprenne et le dise.

VIII. Seigneur Agout, le vois toujours croître votre somptueux mérite, et je le vois grainer et fleurir.

 

 

 

 

 

 

 

 

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