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Français
Jean Audiau

I. L'autre jour, en la joyeuse saison de Pâques, quand j'entendis chanter les oiselets, et cédant à la joie que me donna la verdure, je partis tout seul me divertir. Et dans un pré, cueillant la fleur, je rencontrai une bergère incomparable, gracieuse et gentille, fort bien faite, suivant des agneaux et cueillant la fleur. Elle disait que jamais elle n'eut envie de [se] faire un ami, car c'est ainsi qu'on arrive à se mal comporter.

II. Je la saluai, car je ne crois pas qu'on vît plus belle [fille] garder des agneaux ; et elle me rendit mon salut, mais elle eut peur, parce qu'elle ne m'avait pas vu avant de m'entendre parler, et elle me dit: « Seigneur, il ne me plaît guère que vous soyez venu ici. Vous êtes faible d'esprit, non point par jeunesse Dieu me garde! Que cherchez-vous? Il semblerait que vous fassiez espion de quelques sottes gens, ou bien que vous attire le mensonge du plaisir menteur que l'Amour dénie ! »

III. — « Il est difficile de juger sur l'apparence, jouvencelle, dis-je ; on s'y trompe, car on tient maintes bonnes gens pour des fripons et on loue bien des méchantes gens ; je vous supplie donc, dorénavant, de bien vouloir m'entendre avant de parler. Je ne suis l'esclave d'aucun prétexte ; mais, si cela vous agrée, je vous donne mon amour ». — « Il vous aurait fallu, Seigneur, en trouver une plus folle [que moi]. Je n'accepte pas. Suivez votre route, allez, cherchez votre profit ! »

IV. — « Jeune fille, dis-je, avant de m'en aller, je vous ferai éprouver le doux amusement qui se fait entre amie et amant ; mais je ne veux point vous honnir. Votre grande beauté me plaît tellement que je ne veux point m'éloigner de vous sans cela ». — « Celui qui me parle de la sorte, ne sais pas qui je suis, Seigneur, ni comment, contrariée et furieuse, j'ai traité l'autre jour un vaurien imbécile! Je ne veux rien avoir de commun avec une fille déshonorée! »

V. — « Jeune fille gracieuse, tel que vous me voyez, je vous vaudrais davantage qu'un plus bel [homme] ; car je suis riche d'avoir et bien à l'aise, et je vous en ferai profiter, charmante créature. Veuillez donc, je vous en prie, agréer mon amour, et faisons le doux et nouvel amusement dans le jardin, là-bas, sous ce pin ; car à jamais vous me serez précieuse ». —« Seigneur, ma raison ne se complaît point en votre profit ; car, si vos intentions étaient pures, vous poursuivriez votre route ».

VI. — « Jeune fille, si vous saviez comme je me conduis bien envers Amour, je crois que des fleurs que vous portez vous me feriez vite une couronne. Tout de suite, en nous réjouissant grandement, entrons sous le couvert d'un arbre. » Elle s'en réjouit, car je ne fis point violence à son mérite véritable, et me dit : « Il me plaît, Seigneur, que votre amour triomphe entièrement de moi. Vous vous plaisez à me voir, semble-t-il ; terminons donc ! ».

VII. Patience et Valeur à Guillaume de Lodève ; qu'on ne pense plus à offenser Belh Rai que j'aime mieux que moi-même.

 

 

 

 

 

 

 

 

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