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Français
Jean Mouzat

[UNE DAME DOIT-ELLE CHOISIR POUR AMANT UN AMI DE SON MARI, OU SON ENNEMI ?]

PARTIMEN DE GAUCELM FAIDIT ET D’EN RAIMBAUT

I. Maintenant dites-moi, Gaucelm Faidit, quelle solution est la meilleure pour une dame accomplie, quand elle a un mari preux et gai, et qu’elle veut se choisir un amant ? et deux cavaliers vaillants et aimables lui demandent son amour ; l’un est un ennemi mortel du mari, et l’autre son ami sincère ; chacun fait pour elle tout ce qu’il peut ; choississez lequel des deux elle doit préférer.

II. Seigneur Raimbaut, dans cette discussion poétique, je prends le meilleur et vous laisse le pire ! car je dis à juste raison, et je ne me trompe pas, que c’est le preux ennemi du mari que la dame doit choisir, si elle a valeur et mérite, et l’autre, je le lui interdis ! car vous dites qu’il est l’ami sincère du mari, et moi je dis qu’il est traître envers lui et envers elle et c’est pourquoi la dame ne doit ni le prendre ni le désirer.

III. Gaucelm, vous vous êtes grandement trompé, en déclarant qu’elle doit embrasser et baiser celui qui par guerre, procès et chicane veut couvrir de honte son mari, parce que je m’entends bien à cela ! et donc elle doit cent fois mieux aimer l’ami [du mari] car cela est plus naturel, et que pour elle il agit envers le mari de telle sorte qu’il payerait de sa personne et de son avoir pour lui plaire autrement.

IV. Seigneur Raimbaut, il ne sied pas qu’une dame accomplie s’abaisse avec un tel amant, mais l’autre fait mainte valeureuse entreprise ; et si cela se sait et s’apprend, ce sera honorable, car tous deux se gardent loyalement de traîtrise ; et l’autre n’est qu’amour trompeur et vénal, et amour clandestin et mauvais, et vous ne devez pas le soutenir, car il ne peut pas en provenir de bien !

V. Gaucelm, ce serait bien mal fait, si l’ami qui ne manque jamais de faire tout ce qui convient à sa dame, et qui lui fait maint don et mainte invitation, ne trouvait jamais près d’elle bon vouloir, alors que l’autre lui occit ses gens et les poursuit jusqu’à ses portails, et ne l’aima jamais que pour guerre et pour ruine ; et c’est pourquoi c’est l’ami qui mieux doit recevoir des faveurs (1).

VI. Seigneur Raimbaut, il ne me plaît point que vers une noble dame s’élance avec ardeur pour coucher avec elle un amant aussi vil, qui ainsi a trahi son ami et la dame également, s’il trahissait la convention ; car il ne peut pas en sortir de bonnes choses, et il n’est pas pour elle loyal ni parfait en amour, car celui-ci vaut davantage et doit valoir davantage, et, quoi que vous disiez, moi le dis vrai !

VII. Gaucelm, il ne fait nulle faute, l’ami, s’il est loyal envers sa dame, et c’est tromperie, tort et mal si la dame ne lui donne pas son plaisir, puisqu’il sait vouloir ce qu’il veut.

VII Seigneur Raimbaut, dans notre dispute vous êtes vaincu, vous et le faux ami, car tout juge loyal dira, s’il veut soutenir la justice, que vous avez tort et que je dis la vérité.

 

1) En propres termes : coucher avec elle ou alors il faudrait supposer un verbe jauzer = jausir, non attesté. (

 

 

 

 

 

 

 

 

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