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Français
S. Stronski

I. Bien que je me sois tardivement orienté, pareillement à celui qui après avoir tout perdu jure de ne plus jouer, je dois tenir pour un grand bonheur de m’être aperçu de la grande faussete de l’Amour à mon égard : par belle apparence, il m’a tenu en vaine attente plus de dix ans, à l’instar d’un mauvais débiteur qui promet toujours mais qui ne paierait rien.
 
II. Par la belle apparence que le faux Amour amène, l’amant sot se laisse attirer vers lui et s’[y] attache, comme le papillon dont la nature est si folle qu’il se jette dans le feu à cause de la clarté qui luit ; mais moi, je m’en sépare et je suivrai un autre chemin — [étant] mal payé par lui, car autrement je ne m’en separerais pas — je suivrai l’exemple de tout homme sachant bien souffrir, qui s’emporte fort de même qu’il s’humilie fort.
 
III. Qu’il ne pense pas cependant, bien que je sois irrité et que je fasse en chantant son procès, que je dise quelque chose qui ne paraisse convenable ; mais qu’il sache que c’est bien par lui que je suis perdu, car jamais il n’a voulu me mener à la bride, me laissant, au contraire, faire tout ce que je voulais ; et tojours un choval de grande valeur, si on le laisse s’ébattre trop souvent, en a chagrin.
 
IV. Je serais bien irrité, mais je m’en suis retenu ; car, celui qui se conduit de façon demesurée avec quelqu’un plus fort que lui fait grande folie ; même avec quelqu’un de force égale il est en danger parce qu’il peut être vaincu par lui ; et avec quelqu’un de plus faible que lui, c’est vilenie ; c’est pourquoi la jactance ne m’a jamais plu ni ne me plaît, mais dans la prudence il faut garder l’honneur, car une prudence déshonorée, je ne l’estime pas plus haut que la sottise.
 
V. C’est pour cela, Amour, que je me suis découragé de vous servir, a tel point que je ne m’en préoccuperai plus ; c’est que, de même que l’on apprécie la plus laide peinture de loin, mais non pas quand on s’est approché, je vous ai plus estimé quand je ne vous connaissais pas, et si j’ai jamais voulu vous [connaître], à présent j’ai plus connaissance de vous que je ne voudrais ; car il m’est arrive comme au fol demandeur qui désira que tout ce qu’il aurait touché devint or.
 
T1 Beau sire « Aimant », si Amour vous opprimait, vous et sire « Tout-le-temps », je vous donnerais un conseil : pourvu qu’il vous souvienne combien j’en ai de douleur et combien de bonheur vous ne vous en soucieriez plus.
 
T2. Sire « Le-Plus-Loyal », si je vous voyais de mes yeux, comme je le fais toujours de mon coeur, ce que j’ai dit pourrait avoir valeur, car je demande conseil et c’est moi qui vous donnerais conseil.

 

 

 

 

 

 

 

 

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