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Français
J. Anglade

I. Je sais si habilement joindre et unir mots et musique que, quand j'ai un bon sujet (déchanter), personne, en fait de noble talent poétique, ne m'arrive au talon. Mais la belle à qui j'appartiens me tue comme si j'avais commis des torts envers elle ou si je l'avais trahie. Quand je la vis, elle frappa si bien mon misérable coeur, qu'aussitôt je cherche son bien : cependant elle me rend le mal pour le bien. Elle m'est hostile, je ne sais pourquoi, sinon parce que je l'aime plus que moi.
 
II. Il me semble bien qu'elle voulut m'éloigner de sa contrée, quand elle me fit passer la mer, et je lui en fais un reproche. Mais je n'ai pas d'espoir, car je l'ai servie d'un coeur partait, tant que je pus et sans compter, et je n'eus pour toute récompense qu'un petit cordon. Si, j'eus autre chose : un matin j'entrai dans sa chambre et je lui ravis un baiser sur la bouche et le menton. Voilà tout ce que j'en ai eu ; je suis bien mort, si elle reste plus longtemps indifférente.
 
III. Elle me fait soupirer et pleurer mainte saison, quand il me serait si agréable de me réjouir et de chanter, si c'était son plaisir ; mais elle a un coeur de dragon ; elle rit avec tous ceux qui l'entourent, mais à moi elle me dit de dures paroles et me fait un œil de lion. C'est en me causant ces tourments qu'elle fit de moi un pèlerin, et jamais un véritable pèlerin ne fit pèlerinage plus forcé. Il est bien vrai que tout homme doit chercher à se procurer son bien avant que son seigneur ne lui devienne hostile.
 
IV. Elle me fait enflammer et brûler comme le feu brûle le charbon. Quand je la regarde, je vois si clairs ses yeux et son visage que je ne connais pas de salut pour moi, si je change ou que je me détourne de l'aimer —. Hélas ! comme Amour me tient en sa prison, lui qui vainquit Salomon, David, le vaillant Samson et les tint sous ses fers dont la mort seule les délivra : pour moi, puisqu'il me tient, je devrai rester à sa merci.
 
V. Elle me fait espérer et attendre comme un Breton, pourtant je n'ai jamais cessé de l'aimer et de l'honorer. Au contraire, Dieu me pardonne ! je quittai tel seigneur qui m'aurait comblé de tant de dons que le bon roi d'Aragon eu aurait été honoré ; et pourquoi donc me suis-je exilé ? Je vous assure que quand j'en entends faire l'éloge, j'en éprouve une joie parfaite qui m'invite à chanter. Puisque je l'aime tant et que je suis si obéissant, pourquoi trouverais-je en elle la mauvaise foi ?
 
VI. Je ne trouve repos ni cesse en nulle saison, aussi veux-je m'en retourner et aller au plus vite entre Arles et Toulon, à la dérobée ; car là-bas j'aime mieux un petit champ qu'avoir ici Lodaro, le Toro ou Belin ; mais les misérables et lâches médisants m'ont fait la guerre et m'ont éloigné du perron (de Toulouse ?) et Drogoman ne m'entend ni ne me voit, car il éloigne de lui mon Cher Ami.
 
VII. A mon ami Folcon (Folquet de Marseille) j'envoie là-bas ma chanson, pour qu'il la chante pour moi en bon
lieu, au... (?) où joie va et vient.
 
VIII. Que Dieu lui donne une mauvaise destinée, à celui qui brouilla si méchamment le comte d'Avignon avec moi que Na Vierna ne me voit plus.

 

 

 

 

 

 

 

 

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