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Français
J. Anglade

I. Bien vit en grande douleur qui perd son bon seigneur ; moi j'ai perdu le meilleur que la mort pût tuer. Comme je ne puis mourir et qu'il n'est pas permis de se suicider, pour sauver ma vie je m'en allai en Hongrie, près du bon roi Aimeri, où je trouvai bon asile ; et il m'aura sans coeur infidèle pour serviteur et ami.
 
II. Et il aura grand honneur s'il me prend à son service, car je puis faire entendre sa louange dans l'univers et accroître sa renommée plus qu'aucun autre homme qui soit au monde. Il sut me remarquer et me fit bon accueil : aussi j'estime moins maints riches vils, riches au coeur perfide ; on dira que je parle du fils de Louis [Philippe-Auguste].
 
III. J'estime peu un empereur avare ou voleur ni un roi trompeur, qui veut berner Dieu et honnir ses barons par une injuste tyrannie. Mais au dernier soupir sa félonie ne lui servira pas plus qu'elle ne servit au seigneur Henri [l'empereur] quand il changeait follement d'idée (?), qu'il couvrit de honte le bon roi Richard et qu'il s'attaqua à Dieu.
 
IV. Un roi n'aime pas la valeur, quand il veut croire les traîtres et écouter des serviteurs médisants ; car ces serviteurs font périr la joie, rabaissent la courtoisie et s'empressent de trahir leurs maîtres chaque jour. Alexandre mourut par la main des serviteurs qu'il avait enrichis, et le roi Darius frappa à mort celui qui l'avait élevé.
 
V. Aussi ne veux-je pas de richesse, si ce n'est de joie et d'amour, car je tiens pour un fou celui qui veut trop chercher ce dont il ne peut pas jouir. Je ne veux pas de richesse qui rende les gens jaloux et qui me fasse vilipender. J'aime mieux celle qui m'a trahi à l'heure même où je la vis et dont mon coeur ne s'est pas séparé, depuis qu'elle m'a tant charmé.
 
VI. Car elle ressemble à une rose de Pâques pour la couleur et au lis pour sa blancheur. Quand Dieu voulut la former, il y mit toute son attention, car il ne pensait pas à autre chose. En elle ont voulu revenir Amour et courtoisie. Un regard me frappa, dont jamais elle ne m'a guéri ; mais elle m'en guérira, tôt ou tard, jeune ou vieux.
 
VII. Chanson, va-t-en vers Vich, vers le grain de bon épi [Pierre II d'Aragon], et dis-lui qu'il ne se lasse pas de rendre tout le monde riche.
 
VIII. Allemands, vous êtes, je vous le dis, trop grossiers, trop félons et injustes ; car jamais n'eut à se louer de vous qui vous aima ou qui vous servit.

 

 

 

 

 

 

 

 

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