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Français
J. Anglade

I. Neige ni gelée ni pluie ni boue ne m'enlèvent joie ni allégresse ; le temps obscur me paraît clair, à cause de la nouvelle joie dans laquelle je me repose ; car une jeune dame m'a conquis et si je pouvais la conquérir à mon tour, quand je la contemple, elle me parait si belle que de joie je penserais voler.
 
II. Mais l'autour qui est pris au piège est sauvage jusqu'à ce qu'il soit apprivoisé, puis il devient familier, si on le traite bien et avec douceur ; il vaut plus qu'un autre, quand il a été dressé ; ainsi il est d'usage, quand on veut aimer une jeune femme, de l'apprivoiser gentiment.
 
III. Avec un peu de feu l'ouvrier fond l'or et le brise jusqu'à ce qu'il soit affiné, ce qui rend son oeuvre plus belle ; aussi je ne me plains pas de ma longue souffrance. Et si le feu d'amour s'allumait en elle, comme il a pris en moi, je pourrais chanter de bien ou de mal (?); mais on ne doit pas se désespérer.
 
IV. L'amant d'une noble dame doit être sage et prudent, courtois et mesuré, il ne doit ni se fâcher ni se plaindre. Car amour et fâcherie ne vont pas ensemble ; amour est mesure et pitié ; et l'amant qui a le bon désir d'aimer doit réfréner le dépit par la joie.
 
V. Je suis en compagnie d'une noble dame ; je suis charmé par sa jeunesse, par sa beauté et par son corps bien fait ; mais je n'aime pas un seigneur qui rechigne ou à qui son costume dure trop. De ceux-là j'en sais deux ou trois qu'on pourrait compter au nombre des vilains, si seulement ils savaient labourer.
 
VI. J'ai fait les aventures de Gauvain et beaucoup d'autres ; quand je suis en armes sur mon cheval, tout ce que je poursuis je le mets en pièces et je le brise. J'ai pris à moi seul cent cavaliers et j'en ai dépouillé autant ; j'ai fait pleurer cent femmes, j'en ai fait rire et jouer cent autres.
 
VII. Je m'en tiens à l'usage de l'Étranger : quand je ne me sens pas heureux (hardi ?), je m'efforce tant de tous côtés que je fais conquêtes et gains. Et s'il m'arrivait de venir à bout de ce que j'ai entrepris, je ferais, sans aucun doute, incliner le monde à mon empire.
 
VIII. J'ai maintenant conquis séjour et hospitalité à Malte où je suis admis près du comte Henri ; j'en suis heureux, car aucune qualité ne lui manque. Il est libéral, hardi et courtois, il est l'étoile des Génois ; sur terre comme sur mer, il fait trembler ses ennemis.
 
IX. Je fréquente le comte Arman ; il est généreux et a l'esprit distingué, comme s'il était né à Toulouse, au delà de Caraman. Il a la vaillance d'un Aragonais, la bonne humeur d'un Viennois ; il me ressemble pour la courtoisie et ressemble au roi de Léon pour la libéralité.
 
X. Je suis seigneur des Génois, car grands et petits je les ai tous conquis ; les grands me traitent bien et les petits m'honorent et m'aiment.

 

 

 

 

 

 

 

 

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