I - Il ne serait certes pas question aujourd’hui de prendre le petit déjeuner à midi passé, si l’on s’était bien logé, qu’il y eût de la viande, du pain et du vin, et que brûlât un feu clair comme du feu de hêtre. C’est aujourd’hui le jour le plus précieux de la semaine et je devrais rester en paix, car je voudrais que madame Lana voulût autant mon bien que le seigneur de Poitou.
II - Je retourne parmi les Limousins pour prendre congé de celles qui ont un mérite parfait. Que mon Beau-Seigneur et ma Belle-Zibeline cherchent désormais quelqu’un d’autre pour chanter leurs louanges, car j’ai trouvé la plus fidèle et la plus gracieuse de celles qu’on célèbre au monde. Aussi, je ressens pour elle un amour si quotidien que j’en deviens farouche envers les autres.
III - Noble et jeune personne, affable, sincère et parfaite, de haut et royal parage, pour vous je m’exilerai de mon pays et j’irai vivre au-delà de l’Anjou. Et, puisque vous êtes tellement supérieure aux autres, votre prix est encore plus élevé : ce sera pour la couronne romaine un honneur de ceindre votre tête.
IV - Avec le doux regard qu’elle m’adressa et son clair visage, Amour a fait de moi son esclave. Et mon seigneur m’a fait asseoir auprès d’elle sur un coussin impérial et elle m’a parlé avec douceur et amabilité : ses mots étaient courtois et doux ; par son entretien, j’ai cru qu’elle était Catalane, et par son bon accueil, de Fanjeaux.
V - Avec les gracieuses paroles qu’elle m’adressa et son beau sourire, quand je vis ses dents de cristal et son corps délicat, mince, frais et lisse, si bien pris dans son bliaut, – et son teint était frais et rosé –, elle emprisonna mon cœur. J’ai éprouvé plus de joie que si l’on m’avait donné le Khorassan, car elle m’a permis de me réjouir de sa vue.
E - Parmi toutes les femmes, madame Plus-Grande est supérieure à toutes celles que renferment la mer et la terre.