I - Je chante, car le roi m’en a prié, devant le monde que menace cet état de guerre, sur la partie que je vois disposée sur le tablier ; et nous saurons, quand ils l’auront jouée, desquels des fils sera la terre.
II - Le Jeune Roi l’aurait rapidement fait mat, si le comte Richard n’avait pas été son maître, mais il l’enferme et le cerne si bien qu’il a pris de force l’Angoumois et délivré toute la Saintonge jusqu’au Finistère et au-delà.
III - Si le comte peut agir à sa guise, si les alliés que voici ne le vendent pas, il n’est pas pour autant complètement hors des fers. Nous n’avons jamais vu sanglier plus furieux, quand on l’a blessé ou chassé, qu’il ne le sera ; mais jamais sa course ne l’égare.
IV - Je reconnais que les fils de monseigneur le vieux roi ont péché, car cela fait maintenant deux ans qu’ ils l’ont tenu éloigné de sa retraite d’Angleterre. À mon avis, tous le trompent dans cette affaire, à l’exception de Jean sans Terre.
V - Les Aquitains se sont entendus et se sont soulevés contre lui à la façon des Lombards. Ils préfèrent être bien traités par un roi plutôt que malmenés par un comte ; je peux me porter garant pour eux que tel sera le cas.
VI - Selon moi, cette partie est gagnée de notre côté et reconduite, car nous avons débarrassé l’échiquier des pions de la Vallée ; de fait, tous sont partis terrifiés sans qu’un seul ait pris congé.
VII - Tout a commencé en Limousin, mais cela se terminera ailleurs. Car entre la France et la Normandie, près de Gisors et de Neufmarché, je veux qu’on entende crier : “Arras !”, “Montjoie !” et “Dieu aide !”
VIII- Le bon sens, c’est avec la folie que nous, les Limousins, nous le vaincrons, et cela, pleins d’entrain, car nous voulons qu’on soit libéral et gai ; et cela pèse aux Normands : ils disent que s’ils n’y étaient pas ramenés, aucun d’eux ne viendrait jamais ici.
IX - À mon avis, le roi de France est mal conseillé et encore plus mal dirigé : je le vois étamer sa conduite alors qu’elle aurait plus de prix s’il la dorait ; et s’il n’aide pas son beau-frère, je crains que le bon sens et le mérite ne lui fassent défaut.
X - Français, comme vous êtes plus braves que tous et les plus valeureux, il faut montrer que ne reste en arrière aucun compagnon que le roi ait appelé ; car vous ne serez jamais honorés si vous ne participez pas à la mêlée.
XI - Le duc de Bourgogne a fait savoir qu’il nous aidera cet été avec le secours de la Champagne ; ainsi viendront cinq cents hommes d’armes tels que, lorsque nous serons tous réunis, Poitiers ne pourra pas ne pas s’en plaindre.
XII - Roi qui lutte pour défendre son droit en a meilleur droit sur son patrimoine. Et, parce que l’Espagne a été conquise par Charles, on a toujours parlé de lui. Car ce sont les peines et les largesses qui permettent à un roi de conquérir et de gagner la gloire.
E - Seigneur Rassa, puisse le roi vous offrir ce comté en plus de la Bretagne !
E’ - Le Jeune Roi s’est acquis de la gloire de Burgos jusqu’en Allemagne.