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Français
Gérard Gouiran

I - Je mets fin à mon chant dans le deuil et dans la souffrance, à tout jamais ; je le tiens pour abandonné, car j’ai perdu ma raison et ma joie en la personne du meilleur roi qui naquît jamais d’une mère ; il était généreux, parlait avec grâce, montait bien à cheval, avait belle tournure, une attitude pleine de bonté pour accorder de grands honneurs. Je crois que la douleur me tourmente si fort que je meurs d’en parler. Je le recommande à Dieu pour qu’il le mette à la place de saint Jean.
 
II - Vous auriez été le roi des courtois et l’empereur des preux, seigneur, si vous aviez vécu plus longtemps, car vous aviez reçu le nom de “Jeune Roi” et vous étiez le chef et le père de la jeunesse. Hauberts, épées, beaux bougrans, heaumes, gonfanons, pourpoints, vêtements, joie et amour n’ont plus personne pour les soutenir ou les préserver ; au contraire, ils vous suivront là-bas, car ils partiront avec vous, ainsi que toutes les grandes et belles actions.
 
III - Accueillir gracieusement, faire des dons sans revenir sur eux, réponse courtoise, “Soyez le bienvenu”, grande demeure payée et noblement entretenue, libéralités en argent et en vêtements, ne commettre aucun tort, manger au son de la viole et en écoutant des chants, compagnie nombreuse, pleine de valeur et de puissance, choisie parmi l’élite : je veux que tout cela vous accompagne, qu’on n’en conserve, rien dans le monde trompeur à cause de l’année de mauvais augure qui nous avait fait bon visage.
 
IV - Seigneur, il n’y avait rien à reprendre en vous, car tout le monde vous avait choisi pour le meilleur roi qui eût jamais porté l’écu et le plus audacieux et le meilleur jouteur ; depuis le temps de Roland ni auparavant, on n’a vu personne qui ait un mérite aussi élevé, aime autant la guerre, dont la gloire se répande autant à travers le monde et le ranime à un tel point, même si l’on allait le fouiller absolument partout, du Nil jusqu’au soleil couchant.
 
V - Seigneur, pour l’amour de vous, je veux renoncer à la joie, et tous ceux qui vous avaient vu doivent, pour l’amour de vous, être affligés et silencieux, et que la joie ne vienne jamais éclairer ma peine ! Anglais et Normands, Bretons et Irlandais, Aquitains et Gascons et l’Anjou éprouvent un dommage ainsi que le Maine et Tours. Que la France jusqu’à Compiègne n’essaie pas de retenir ses larmes, de même que les Flamands, de Gand jusqu’au port de Wissant ; que pleurent même les Allemands !
 
E - Les Lorrains et les Brabançons, quands ils jouteront, seront affligés de ne pas vous voir.
 
E’ - Le monde et ceux qui s’y trouvent n’ont pas plus de valeur à mes yeux qu’un besan ou une cupule de gland,
 
E” - à cause de la mort déplorable du bon roi de haut mérite dont nous devons tous ressentir le préjudice.

 

 

 

 

 

 

 

 

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