I. Je loue Dieu et saint André de ce que nul n'a meilleur jugement que moi, je le pense ; je ne fais pas de bruit, (je ne m'en vante pas), je voudrais vous dire mes raisons.
II. Il est bien déplaisant, si vous entrez en discussion, de ne pas savoir faire la lumière et il n'est pas bon, si vous parlez sur un sujet, que vous ne sachiez bien l'exposer.
III. Je suis tellement pourvu d'un sens ingénieux que je suis très difficile à bafouer. Le pain du fou, chaud et mollet, je le mange et laisse le mien refroidir.
IV. Tant qu'il lui dure (au fou), je lui garantis et lui jure qu'on ne pourrait me séparer de lui, mais quand le pain lui manque, qu'il muse et bâille et qu'il lui prend désir du mien...
V. Car je juge à bon droit que si le fou fait des folies, le sage doit se garer en se séparant de lui, car il est doublement sot et insensé, celui qui se laisse gagner par la folie du fou.
VI. Pour frapper d'estoc breton et de bâton, nul ne l'emporte sur moi, ni pour l'escrime, car je frappe autrui et me garde de lui sans qu'il sache se garantir de mes coups.
VII. Dans le bois d'autrui je chasse quand je veux : j'y fais clabauder mes deux petits chiens, tandis que le troisième se met en arrêt (se tient à l'écart silencieux) (?), hardi et planté pour atteindre la proie.
VIII. Mon fief est si bien défendu que nul, sauf moi, ne peut en jouir. Je l'ai entouré de poix de navire (?) si bien que personne ne peut le forcer.
IX. Je suis doué et rempli d'une infinité d'artifices, de cent moyens pour aboutir [ou nuire]. D'un côté, je porte le feu, de l'autre, je porte l'eau et, avec elle, je sais éteindre la flamme.
X. Que chacun se garde, car avec de tels talents je dois vivre et mourir. Je suis l'oiseau qui fait nourrir ses oisillons par les étourneaux.