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Français
Jules Coulet

I. Les anciens troubadours n'ont pas tant parlé du sujet d'amour jadis au temps joyeux, que maintenant encore nous ne puissions après eux faire de beaux chants à la fois nouveaux, agréables & sincères. On peut, en effet dire des choses qui n'aient pas été dites; du reste, un poète n'est grand & n'a de mérite que lorsque ses chants sont nouveaux, gracieux, bien composés, sur des pensées nouvelles & d'un art nouveau.
 
II. Mais dans leurs poésies les débutants parlent tant & tant d'amour qu'en parler de nouveau est chose rebutante. Mais ce qui est nouveau, c'est quand les maîtres disent ce qui n'avait jamais encore été dit en poésie, c'est si l'on dit ce que l'on n'avait pas encore entendu, & si l'on exprime, comme moi, des idées qui ne l'avaient pas été. Car Amour m'a donne ma science & m'inspire si bien que, si la poésie n'existait pas déjà, je la créerais.
 
III. J'aime à chanter quand je pense au grand honneur qui me vient d'amour, & je veux essayer d'en faire de beaux chants. Car celle qui agrée mes vers & ma louange a la fleur de la beauté qui naît. Aussi je vous assure qu'on ferait mieux de croire que sa beauté vient du ciel, car elle semble si bien être une œuvre du Paradis que sa grâce ne parait pas être celle d'une mortelle.
 
IV. C'est de la part des dames une bien grande folie que de faire tant de difficultés pour se laisser aimer. Car toute dame qui reconnaît que son amant est sincère commet une faute si elle tarde à l'agréer. On vit, en effet, moins longtemps qu'on ne faisait autrefois. Je voudrais donc que cette fâcheuse coutume de trop longs délais disparût, car, à mon avis, l'on vivrait plus longtemps si l'on connaissait les joies de l'amour.
 
V. Elle se nuit à elle-même la dame qui se fait hautaine & s'irrite quand on la prie d'amour. Il lui vaut mieux souffrir un soupirant que de commettre par ailleurs de vilaines fautes. Car il y a de telles dames; on ne voudrait pas le croire, même si on le disait, tant le fait est honteux. Et l'on voit Amour tomber, s'en aller, disparaître parce qu'elles entendent si mal le souci de leur dignité.
 
VI. Pour moi, j'aime & je sers une dame qui ignore les trahisons d'amour; aussi je ne veux ni ne dois m'écarter d'elle. Je la tiens pour la meilleure, pour la plus belle, & c'est pourquoi l'amour m'attire vers elle. Bien fou, en effet, l'amant qui ne fait pas choix d'une personne digne d'être aimée. Qui aime en bas lieu, s'abaisse lui-même; c'est aux meilleures que l'on doit porter ses hommages, & de la naissent Merci, Valeur & Courtoisie.
 
VII. Esclarmonde, qui vous êtes, vous & Guise, chacun de vos noms le dit assez. Chacun d'eux est en effet si précieux & si pur que qui l'a dans l'esprit est, de tout le jour, à l’abri du mal.

 

 

 

 

 

 

 

 

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