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Français
Jean Boutière

I. C’est un vil sirventés, facile et vulgaire, que je veux bâtir avec de vils mots, sur un vil sujet ; et, assurément, je ne saurai pas l’avilir autant que le feront les vils barons, menteurs et déloyaux, vils envers eux-mêmes, envers leurs semblables et envers Dieu, vils mille fois autant et plus que je ne le dis ; aussi je veux faire mon sirventés vil et déplaisant, puisque leurs vilaines manières d’agir sont si viles.
 
II. Il ne me déplaît pas de perdre à le faire une journée, car ni les barons ni mes chants ne sont en rien précieux ; mais celui qui a su gentiment se retirer du mal perd sa perte, et cette perte devient pour lui un profit ; aussi, tout en perdant [mon temps], je fais un gain, [à vrai dire] mince et léger, puisque de ceci seulement je sais rapidement me délivrer : les mots bâtards sont à présent bien assez bons pour ma poésie, ainsi que ces déplaisants barons [qui en sont le sujet].
 
III. Comme je ne veux pas que ma chanson ait la moindre saveur, ni qu’on la loue en aucune cour, j’y mets d’abord, pour l’affadir, le vieux seigneur du Thor, car il ne vaut rien ; ainsi on tiendra le sirventés pour pins mauvais. Et je ne le lui mande pas par lettre ou par bref : au contraire, je lui dis en paroles et ouvertement que je le tiens pour le pire des lâches.
 
IV. Puisque j’injurie et rabaisse moi-même mon sirventés, j’y mettrai, pour le détruire, en guise de menteur parfait, le « demi-prince » qui naquit à la mort de toute parole vraie ; car de cela (de mensonge) il tient boutique à usure, et c’est à tort qu’il tient le fief de la principauté. Si je l’ai loué [antérieurement], en mentant, dans mes couplets, que Dieu me le pardonne, car je me déments sincèrement.
 
V. Puisque les deux « petits Raimons » de Mévouillon sont également lâches (et plus qu’on ne saurait le dire), je les mettrai, pour finir, dans mon sirventés (à condition que Dieu ne les sauve pas, mais qu’ils soient pris ou tués avant la fin de l’année), ainsi que le seigneur Vassadel, si toutefois il se fie encore à eux ; car il les a servis longuement pour rien ; mais qui sert un mauvais [seigneur] s’attend à une mauvaise récompense.
 
VI. Le sirventés tient le pied à rétrier, car il est sur le point de partir (?) ; je ne le tiens pas pour mien ; au contraire, je le renie ici et je le désapprends, car il est mauvais, puisqu’il est fait de lâches personnes.

 

 

 

 

 

 

 

 

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