I. Comme je n’ai pas envie de faire uue chanson, je ferai un nouveau sirventés où il s’agira des affaires de Provence, & je l’enverrai aux Français ; car si celui qui est comte et marquis tarde longtemps à venir ici, les Marseillais ne se laisseront pas de si tôt amener par la crainte à lui rendre ses revenus, aussi bien ceux qu’il touchait de la ville basse que les autres qu’ils détiennent illégalement.
II. Je lui rappelle là-bas qu’il doit venir en ce pays, car il ne touche ni ses revenus d’Avignon, quoique son père ait conquis cette ville, ni — il me semble — tout ce que le valeureux comte touchait d’Arles, & il perd du côté d’Aups, au delà de la Durance, le comté du pays de Gap ; mais s’il ne diffère pas trop de prendre une résolution, il n’y perdra ni un champ ni un jardin.
III. Mais que le comte ne croie pas que c’est en se reposant ou en hésitant longtemps (à venir) qu’il pourra recouvrer ici ses droits; au contraire, il aura à étendre la main & à s’armer souvent, & à enlever, à donner & à prendre, s’il veut faire une guerre glorieuse ; car c’est ainsi qu’il recouvrera le fief qu’à sa honte on lui dispute ici.
V. Celui qui le mit en ce pays, ..., pour son malheur, sa société, car ceux qui firent le mariage se sauveront d’ici la tête basse ; mais (?) si le fils du roi de France diminue en puissance dans ses propres États, il aura, semble-t-il, de la peine à vaincre outre-mer les Turcs & les Kharismiens, car celui qui ne réclame pas énergiquement ce qui lui est dû conquerra difficilement le fief d’un autre.
VI. Si le comte ne fait pas bientôt un commencement, je suis certain & convaincu que l’autre parti gagnera en autorité à mesure qu’il restera plus longtemps à Paris, parce que plus pèse en la balance le mal qu’on dit de lui que le bien & les louanges, à moins qu’il n’agisse ici avec plus d’énergie ; mais tout cela sera facilement réparé, pourvu qu’il n’éprouve pas de contretemps.