Stroński, Stanislas. Le troubadour Elias de Barjols. Toulouse: Imprimerie et librairie Édouard Privat, 1906.
132,013- Elias de Barjols
III. (132, 13.)
Orth. : I.
Les manuscrits :
Le texte est, en général, assez uniforme dans tous les mss. qui appartiennent, comme d’ordinaire, à la même famille. Bien que le nombre des variantes caractéristiques soit très restreint, elles paraissent pourtant justifier la classification proposée.
Les divergences de N (vv. 12, (21), 33, 39) sont insignifiantes ; mais, toutefois, les leçons N sont toujours à écarter comme n’appartenant qu’à ce ms. C’est surtout le fait que N est seul à contenir les vers 13-4 qui atteste une source à part pour ce ms. D’autre part, N rapporte cette pièce à un autre titre que les autres mss. ; elle y fait, avec 132, 12 (n. IV), partie du recueil des descorts de N qui ne contient aucune autre pièce d’Elias de Barjols.
x (HDIK) : v. 12 (desvai pour estrai, peut-être à cause de desfai du v. 14) ; en même temps l’omission des vv. 13-14, car il ne paraît pas possible qu’ils aient été interpolés dans N. — La pièce est semi-anonyme dans H ; mais il résulte de ce que nous avons dit plus haut que ceci ne saurait éliminer H du groupe x.
Le genre et la forme. — C’est un descort (cf. Appel, Vom Descort, dans Z. f. r. Ph., XI, pp. 212-30 ; ajoutez : Appel, Prov. Inéd., 461, 17 ; Studj di fil. rom., VIII, p. 454, Guilhem de La Tor, 236, 3ª ; J. Müller, Gedichte desGuillem Augier Novella, dans Z. f. r. Ph., XXIII, pp. 60-70 ; cf. aussi pour 461, 42, cité par Appel et par P. Meyer, Rom., I, p. 402 ; G. Bertoni, Un descort d’Albertet deSisteron, dans Ann. du Midi, XV, p. 493). — Ce descort n’a aucune particularité qui distingue sa facture de celle des autres. Comme quelques autres, il est désigné par le poète lui-même : un descort gai (cf. Appel, Vom Descort, p. 219, et cf. Bertoni, Un Descort, p. 461, 42 : Bel m’es oimais | Ab la douza sazon gaia | Qe sia gais | E qu’un gai descort retraia). Appel a déjà observé que cette définition — qui paraît se rapporter surtout à la musique, comme l’indique l’expression son gai qui revient plusieurs fois, — ne s’accorde pas facilement avec le fait que les descorts sont essentiellement empreints d’un caractère élégiaque. Les strophes sont, comme d’ordinaire, singulars (la rime -ai se trouve dans les strophes I et II), à deux rimes, à différente structure interne, différentes suites des rimes, différent nombre de vers et différentes combinaisons de leur longueur :
I
4a’ 6a’ 6a’ 7b || 4a’ 6a’ 6a’ 7b
II
5c’ 8b 5c’ 8b 5c’ 8b 5c’ 8b
III
4d’ 5d’ 5e || 4d’ 5d’ 5e || 4d’ 5d’ 5e || 4d’ 5d’ 5e’
M. Appel a cité la formule d’une moitié de la strophe IV, sans la partager en deux, comme exemple des longues constructions strophiques fréquentes dans le descort. Mais, il a ajouté : « Lorsqu’il s’agit de semblables longues parties de strophes, l’examen de la mélodie aboutirait sans doute à établir encore une division secondaire, suivant l’usage général, qui est de ne pas faire les parties d’une strophe plus longues que quatre rimes. » La subdivision marquée ci-dessus paraît être indiquée par le vers court 2g qui forme toujours une finale et marque bien un arrêt de la pensée, au moins dans la seconde moitié (vv. 38-9) et la tornada (vv. 45-6).
Tornada (date et localisation). — 43-5 D’En Agout volria... — Ce descort est le premier témoignage de la présence d’Elias en Provence, où résidait Raimon d’Agout, seigneur de Sault. Pour la date, on ne peut indiquer que le terminus ad quem, commencement de l’année 1204, date à laquelle d’Agout ne vivait plus. Tout ce l’on peut ajouter, c’est que, d’après le récit de la biographie, le séjour d’Elias en Provence, antérieur à ses relations avec la cour d’Alfonse II, ne paraît pas avoir été long ; en conséquence, son séjour chez Raimon d’Agout se place probablement dans les dernières années de la vie de celui-ci, vers 1200-1204.