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Bec, Pierre. Burlesque et obscénité chez les troubadours. Pour une approche du contre-texte médiéval. Paris: Stock, 1984.

461,202- Anonyme

 

III
 
Le contre-texte obscène

 

38
 
Cobla scatologique (parodie)
 
Anonyme

 

La cobla suivante est la parodie grossière de la première strophe d'une célèbre chanson de Bernard de Ventadour, qui connut sans doute au Moyen Âge une telle fortune qu'elle suscita au moins deux parodies : l'une en français, dans la quatrième strophe d'une chanson de croisade de Guiot de Dijon, et une autre, de caractère scatologique, que nous donnons ici. Nous rappelons aussi le débat scatologique en deux langues d'Arnaut Catalan et Alphonse X de Castille et dont la première cobla reprend le mètre et les rimes de la non moins célèbre chanson de l'alouette, du même Bernard (cf. nº 33), cobla qui fut également parodiée dans une razó burlesque (cf. nº 21). Ces parodies, qui ont dû être vraisemblablement plus nombreuses que ce qu'il en reste aujourd'hui, sont à la fois le signe de la réputation du troubadour et des virtualités contre-textuelles que ne pouvait pas ne pas générer le chantre le plus éthéré du pur amour. A cela, comme nous l'avons déjà fait remarquer, il faut ajouter le nom même du troubadour, Ventadorn, interprété malicieusement ventador, c'est-à-dire le « péteur ». Nous donnons successivement : le prototype de Bernard, la paraphrase française et la parodie scatologique :

Quan la freid' aura venta
Devès vòstre païs,
Vejaire m'es qu'eu senta
Un vent de paradís
Per amor de la genta
Vas cui eu sui aclís,
On ai mesa m'ententa
E mon coratge assís,
Car de totas partís
Per lèis, tant m'atalenta (1) ?
 
(Quand la froide bise souffle / Du côté de votre pays, / Il me semble sentir / Un vent de paradis / A cause de l'amour de la noble Dame / Vers laquelle je suis attiré, / En qui j'ai placé mon affection / Et fixé mes désirs, / Car je quitterais toutes les autres / Pour elle, tant elle m'attire !)
 
De ce sui en bone entente
Quant je son homage pris,
Quant l'alaine douce vente
Qui vient dou tresdouz pais
Ou cil est qui m'atalente,
Volontiers i tor mon vis ;
Dex, m'est vis que je le sente
Par desoz mon mantel gris (2).

 

PILL.-CARST. : 461/202.

 

 

Notes :

1. Cf. éd. M. LAZAR : Bernard de Ventadour, Chansons d'amour, Paris, 1966, p. 160.

2. Cf. P. BEC : La Lyrique française au Moyen Age (XIIe-XIIIe siècle), vol. II, p. 93.

 

 

 

 

 

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