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Meyer, Paul. Les derniers troubadours de la Provence d'après le chansonnier donné à la Bibliothèque Impériale par M. Ch. Giraud. Paris: Librairie A. Franck, 1871.

415,002- Rainaut de Tres Sauzes

 

§ XXV.

Peire Trabustal et Rainaut de Tres Sauses.

 

Cette tenson (il serait plus juste de dire « ce partimen ») est assez faible. — « Une dame, dit Peire Trabustal, «veut vous donner son amour àcondition d’être votre femme ou votre amie ; autrement elle refuse (quel troisième parti pourrait-elle bien imaginer ?) ; choisissez ». — Rainaut trouve que le mieux, pour le présent, est de la prendre comme amie. — « Mais, reprend Peire, Dieu a condamné Adam pour avoir transgressé ses ordres, et vous savez bien que Dieu n’aime pas qu’on ait une amie ; prenez-la donc pour femme. — Compagnon Peire, Dieu élève les humbles et abaisse les orgueilleux. Puisqu’elle s’humilie envers moi, je dois bien penser que je ne pourrais la maintenir au rang qui lui appartient, car elle est telle qu’elle a le prix de l’humilité ». — Peire déclare qu’il n’aime pas les débats (pourquoi alors propose-t-il un jeu-parti ?), et il insiste sur le précepte du cinquième commandement dont il justifie la nécessité par de très-pauvres raisons. — Rainaut, qui est un esprit subtil, pense que l’amour ne vaut qu’autant qu’il se vend cher : or (en épousant la dame), il ne se mettrait point à un prix assez élevé (caritat non auria a mi mezes) ; il doit d’abord se faire cher (car mi dey far...), puisqu’il n’a d’ailleurs aucune raison d’être la marchandise de personne (1). Peire soumet cette question délicate à un Tarasconnais nommé Bérenguier. Rainaut, toujours fin, déclare s’en remettre au jugement d’une dame qu’il ne désigne que par d’assez vagues éloges ; « mais, dit-il, sans dire le nom, tout le monde sait de qui il s’agit ».

Rainaut de Tres Sauses est encore l’auteur d’un couplet français écrit sur le recto du fol. 22, au-dessous des deux coblas de Bertran Albaric. C’est une requête dans laquelle le poète se rappelle en souvenir son « bel senhor », le priant de tenir sa promesse. Quel est le personnage à l’égard duquel Raynaut croyait devoir s’imposer la gêne très-visible d’écrire en français ? Peut-être Charles-le-Boiteux ou quelqu’un des seigneurs de sa suite, car la pièce est trop récente pour qu’on puisse penser à Charles Ier.

Ces deux pièces sont écrites par une même main que je désigne par γ. Elles paraissent avoir été insérées après les pièces de Bertran Albaric ; c’est du moins ce qui semble résulter de la place que les unes et les autres occupent dans le ms. (2) La tenson est écrite, non pas à lignes pleines, mais à deux vers par ligne. Certaines corrections pourraient faire croire que nous avons l’autographe même de l’auteur. Les rimes prouvent qu’il ne s’attachait pas à observer avec beaucoup de rigueur les lois de la déclinaison romane.

Peire Trabustal et Raynaut de Tres Sauses (ou des Trois Saules) sont demeurés jusqu’à ce jour aussi parfaitement inconnus l’un que l’autre.

 

Notes :

1. Tel est du moins le sens que je crois démêler. ()

2. Cf. ce qui a été dit ci-dessus dans la description du ms., Introduction, § III, n. 18. ()

 

 

 

 

 

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