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Stroński, Stanislas. Le troubadour Elias de Barjols. Toulouse: Imprimerie et librairie Édouard Privat, 1906.

132,011- Elias de Barjols

 

X. (132, 11.)

 

Orth. : C.

 

Les manuscrits.— Les deux branches x et y se séparent visiblement l’une de l’autre. Quant à a’, il est probable que son texte a eu pour base une rédaction x, mais s’est aidé d’une rédaction y.

 

 

x: vv. 7 (ag[es]), 29 (auar e tenen poura. t.), 34 (sestrai pour que·ls tray), 36 (autre be pour negus bes) ; cf. aussi v. 15 (desenan contre dezenans). — Les textes DIKH se ressemblent trop pour qu’on puisse indiquer une subdivision de ce groupe. DIK ont, au v. 17, fui contre suy des autres mss., mais c’est plutôt fui qui est  juste ; IK ont ben, comme C, pour bell’ au v. 38.

y: vv. 13 (que tug nan esiauzimen pour qui n’an tot lo iauzimen), 24 (pus pour ni), 27 (que pour queu), 28 (tem pour pes), 31 (res pour ren), 32 (e pour ab), 40 (de tot malestars defen pour de son bon pretz no deissen), 41-1 (manquent), 45 (Richart pour Nisnart ; tollen pour meten) ; cf. encore v. 23 (mas contre pos).

a’ se rattache à x par la fausse leçon du v. 14, be nom fai, et par la graphie ; l’influence des deux rédactions x et y se manifeste dans les hésitations et les corrections de a’, là où x et y ont des leçons différentes.

 

La forme. — 5 coblas unissonans de même formule que les chansons VIII et XI :

7a 7b 8b 7a 7c 7d 7d 7c

Amor est souligné au début du 2e ou du 3e vers de chaque strophe. Esperansa est deux fois en rime, vv. 7 et 22.

 

Date et localisation. — La première tornada (vv. 41-4) célèbre Béatrice, femme de Raimon-Bérenger IV (vv. 43-4), ansi que ses parents, Thomas I, comte de Savoie (1178-1233), et Marguerite de Génevois, femme de celui-ci (m. 1257). Le fait qu’Elias de Barjols y parle encore de la Savoie et non pas de la Provence, et en même temps la mention de la « flor » de Savoie dont « esperam frug valen » indiquent un moment très voisin du mariage de Raimon-Bérenger et de Béatrice. Celui-ci eut lieu (cf. plus haut, n. IX) vers les confins des années 1219 et 1220. Nous acceptons donc la date 1220 d’après la première tornada.

La seconde tornada nomme Blacatz, le protecteur constant et principal d’Elias, et en même temps Isnart, qui est le troubadour Isnart d’Antravenas (sur une erreur de Cavedoni, qui voyait dans cette tornada une mention d’Isnardo Malaspina, cf. Bertoni, dans Giorn. stor. d. l. it., XXXVIII, p. 146, n. 28). On sait qu’il y a un échange de quatre pièces entre lui et Blacatz et que cet échange avait dégénéré en une polémique assez violente. Cela se passa vers le temps où

Elias composa notre chanson ; or, du moment qu’Elias les nomme tous deux dans sa tornada, qu’il fait allusion, d’une façon plus délicate, aux mêmes choses que Blacatz dans 97, 1 (creissetz de terr’e d’onransa — ce que Blacatz lui reprocha), qu’il proclame enfin Blacatz toujours plus valen, il me paraît naturel de rattacher cette tornada à la polémique entre Blacatz et Isnart. Soltau qui mentionne ces allusions d’Elias ne l’a pas remarqué ou bien ne le croit pas (Z. f. r. Ph., XXIV, p. 53, note à IX c, v. 9). [Lorsque Cadenet (106, 13, str. III) dit : Qu’ieu ai auzit mal dire d’En Blacatz Que per aisso non is refrenet un dia E dEn Raimon d’Agout... etc., il s’en prend au comte de Burlatz qui, froissé par une invective poétique, paraît avoir chassé tous les troubadours de sa cour ; ceci pourrait bien ne pas viser précisément cette polémique, mais renfermer aussi un trait à l’adresse d’Isnart (254, 2)].

Cette datation souffre, il est vrai, quelque difficulté. D’après la première tornada, notre chanson serait de 1220, et d’après la seconde, elle aurait suivi de très près les pièces Blacatz-Isnart. Or, Soltau n’admet pas pour cet échange de sirventés une date antérieure à 1221 (Z. f. r. Ph., XXIII, p. 217). Le premier point d’appui pour la datation se trouve dans 97, 1 de Blacatz : celui-ci dit que son adversaire te·l sos-man que n’Aureilla tenia, et nous savons qu’Isnart fut élu podestat d’Arles vers le milieu de 1220, en remplacement des consuls, parmi lesquels se trouvait un Petrus Aurelle ; ceci va donc bien pour 1220 et pour 1221. Mais comme Blacatz dit, cinq vers plus haut : es tan prezatz pos tenc la sozbailia, Soltau en conclut qu’Isnart « avait occupé son poste déjà une fois antérieurement », notamment en 1220, ce qui serait visé par tenc la sozbailia, et qu’il fut réélu pour 1221, date de sa seconde administration, qui serait contemporaine de l’échange de sirventés et visée par te·l sos-man. Mais d’abord, lorsque Soltau (ibid., p. 206) écrit que les citoyens d’Arles « le (Isnart) réélurent après l’écoulement de sa période administrative et ne pensèrent à la nouvelle investiture pour leur magistrature principale que peu de temps avant la fin de 1221 (Anibert, III, 24) », je crois que ni le renvoi, ni le raisonnement ne sont exacts. Anibert dit bien que l’on fit des démarches en vue de la nouvelle élection (1222) vers la fin de 1221. Mais il ne sait rien d’une réélection d’Isnart pour 1221. Soltau ne peut donc que supposer qu’Isnart fut réélu, pour 1221, cette même année, vers Pâques, date ordinaire des élections. Mais ici, il est en contradiction avec Anibert, qui dit : « Le nombre des électeurs du Podestat et le temps des élections étaient-ils fixés ? Je l’ignore, ou plutôt j’en doute. Il y eut des variations si singulières sur tout le reste ! Par exemple, les pouvoirs des Podestats devaient commencer, ainsi que ceux des Consuls, le mardi 3e fête de Pâques, jusqu’à pareil jour de l’année suivante.  Cependant Isnard d’Entrevenes entra en exercice après cette fête, Guillaume Ebriac le Noir et Albert de Lavaque quelque temps avant, et Barral des Baux, vers la fin du mois de décembre ou au commencement du mois de janvier ». Aucune réélection d’Isnart n’est attestée. Il fut élu après son terme et il exerça sa charge au delà des limites régulières, ce qui était fréquent, vu les difficultés des élections ; il serait, au contraire, bien singulier qu’il y eût eu une première élection d’Isnart vers le milieu de 1220, une deuxième avant Pâques 1221, enfin, une troisième vers la fin de 1221. Or, une réélection d’Isnart étant inattestée et improbable, la distinction qu’a faite Soltau entre te et tenc est inadmissible, outre que le parfait tenc ne serait probable que dans le cas où Isnart ne serait plus du tout podestat d’Arles. Enfin, est-il probable que Blacatz aurait dit tenc la sozbaillia pour parler de l’administration d’Arles et qu’il aurait répété, cinq vers plus bas, te lo sos-man que n’Aureilla tenia pour parler du même fait ? La première allusion se rapporte nécessairement à autre chose. Je ne sais pas exactement à quoi ; mais nous savons q’Isnart fut investi en 1204, par Philippe de Souabe, de la vallée de Sault en qualité de vassal immédiat de l’Empire ; nous savons aussi qu’il ne renouvela pas son hommage après la mort de Philippe, qu’il s’en sentit sans doute dispensé (jusqu’à 1238), puisqu’il se contenta de se faire confirmer ses privilèges par Raimon Bérenger en 1216 (et en 1224) (cf. l’art. que je publierai ailleurs sur d’Agout) ; il paraîtrait donc assez naturel de supposer que les mots es tan prezatz pos tenc la sozbailia se rapportent précisément à sa situation féodale. — Il semble donc qu’il n’y ait aucune difficulté à affirmer que la chanson d’Elias, qui est plutôt de 1220 que de 1221, contient des allusions à l’échange récent de sirventés entre Blacatz et Isnart. — En somme, cette chanson, voisine, d’une part, du mariage de Raimon-Bérenger V et de Béatrice, d’autre part suivant de très près la polémique Isnart-Blacatz, doit être de l’année 1220. 

 

 

 

 

 

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