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Coulet, Jules. Le troubadour Guilhem Montanhagol. Toulouse: Imprimerie et Librairie Édouard Privat, 1898.

225,012- Guilhem de Montanhagol

1. Raimond de Cornet commence aussi à peu près de même sorte son sirventesPer tot lo mons vay la gens murmuran. (Noulet & Chabaneau, Deux Manuscrits, p. 82.)
 
2. de desmezura de lor senhors. — On peut se demander comment sont construits ces deux régimes. On pourrait considérer de desmezura comme une locution adverbiale formée de même façon que de natura = naturellement. (Cf. de Lollis, Sordello di Goïto, p. 302.) On traduirait alors: « Les peuples se plaignent de leurs seigneurs au delà de toute mesure. » Mais desmezura ne paraît pas avoir d'autre sens que celui de absence de mesure, insolence, injustice. (Cf. E. Levy, Provenz. Supplem, Woerterbuch, II, l50.) D'autre part, on ne peut considérer de lor senhors comme le complément déterminatif de desmezura, car, dans ce cas, le substantif déterminé devrait être précédé de l'article. En réalité, nous avons une construction assez curieuse, quoique facilement explicable. Le verbe se planher se construit en effet avec de, que le régime soit un nom de personne ou un nom de chose. On dit également: se planher de alcu & se planher de alcuna re. Ce sont ces deux constructions simultanément employées que nous avons dans l'exemple présent: « Les peuples se plaignent de leurs seigneurs au sujet de leur injustice. » L'absence de l'article devant desmezura n'a rien de choquant, le mot restant indéterminé.
 
6. deves marque ici l'origine, l'endroit d'où l'on vient . du côté de. (Cf. de même, I, 6.) Nous ne croyons pas nécessaire de l'écrire de ves, ainsi que le propose Stimming (Bertran de Born, p. 275), afin de le distinguer de deves = du côté où l'on va. En réalité, c'est bien un même mot dans deux emplois différents, & le contexte suffit toujours a indiquer le sens qu'on doit lui donner.
 
7. Ainsi que l'ont remarqué Diez (Leben u. Werke, p. 466) &, après lui, de Lollis (Sordello di Goïto, p. 287), l'allusion faite plus loin à l'élection d'Alphonse X à l'Empire (1257) prouve qu'il s'agit ici non de l'invasion mongole de 1241-1242, mais de l'agitation qui se manifesta de nouveau en 1258 & qui renouvela les craintes de l'Europe.
 
8. estar d'una mensura = être égal, au même niveau, a ici un sens très fort par l'intention ironique qu'y met le poète. Dans l'usage ordinaire, l'expression était synonyme de être égal, être indifférent:
 
Totz jorns chant qu'ara m'agrada
E fassa caut o freidura
Trastot m'es d'una mezura
Amors e joys d'eyssa guiza.
(Marcabrus, Lanquan fuelhon li boscatge.)
 
11. si ve esta dezaventura... s'a Dieu merces. — Ici encore, deux propositions coordonnées sont juxtaposées sans être jointes par et. Cf. la note à VII, 15.
 
12. s'a Dieu merces no pren. — Sur ce sens & cette construction du verbe prendre, cf. VI, 14, & la note.
 
15. Diez (Leben u. Werke, p. 467), qui cite ce passage, traduit: « Si le pape les met d'accord, les fait être du même avis, rien dans la suite ne saurait leur arriver de fâcheux. » Mais c'est, croyons-nous, mal entendre ben & supprimer le trait de satire que le poète voulait lancer contre le Saint-Siège. En réalité, il faut entendre fai ben au sens de ben far alcu, « bien traiter quelqu'un ». Inutile de supposer une faute des manuscrits & de corriger los en lor. Le poète détermine l'expression courante ben far alcu en ajoutant d'un acordamen: « Si le pape leur accorde le bienfait de les mettre d'accord. » Le poète se souvient, en effet, du mal que, sous couleur de pacification, l'intervention du pape avait fait au Midi de la France. C'est à elle qu'est due la ruine de la maison de Toulouse, & l'on comprend la colère de Montanhagol qui, ici, s'exprime sous la forme de l'ironie.
 
21. l'autrui = le bien d'autrui. Cf. Appel, Chrestomathie, au Glossaire.
 
23. son vestir vilmen. — L'infinitif devenu substantif conserve de son origine verbale la faculté d'être déterminé par des adverbes. Cf. de même, gent tener, IV, 34, lo trop tarzar, VII, 31, & Diez, Grammaire, trad. franç., III, 200.
 
25. Doit-on corriger & lire e.lh gran senhor? Nous avons certainement là un cas sujet. C'est, en effet, un des procédés du provençal pour attirer l'attention sur un régime qui, logiquement, ne viendrait qu'après. Il le met en tête de la phrase soit en le faisant précéder de de (cf. I, 20, & la note), soit en le construisant d'une façon presque indépendante & en le mettant au cas sujet. (Cf. de même au vers 37: e senher tanh.) Sur cette construction, cf. Stimming, Bertran de Born, 236. Mais on peut admettre qu'à l'époque de notre poète la forme de l'accusatif pluriel commençait déjà à être la forme du pluriel sans distinction de cas. Cf. de même, VIII, 42-43: los corns, los pes, employés comme cas sujet pluriel.
se prendre cura n'est pas mentionné par E. Levy (Provenz. SupplemWoerterbuch, I, 429), mais l’on comprend que prer dre cura ait pu être influencé par la construction de l'expression, synonyme: se dar cura, dont il donne plusieurs exemples.
 
28. l'autruy dreg. — L'adjectif autruy, employé comme substantif, signifie: les autres. (Cf. v. 30.) Ici il a la valeur & le sens d'un véritable génitif. (Cf. plusieurs exemples de cet emploi, in Appel, Chrestomathie, au Glossaire.) L'absence de la particule de: lo dreg d'autruy & la place du déterminatif n'ont rien de surprenant. Cf. ses deu licencia = ses licencia de deu cité par Diez, Grammaire, trad. franç., III, 128; cf. XIV, 38, un exemple analogue: per lieys lunh galiamen = per lunh galiamen de lieys.
 
34. Sur l'emploi du subjonctif dans la proposition relative correspondant à l'usage latin, cf. III, 29, & la note.
 
37. Sur la construction e senher tanh, &c., cf. la note au vers 25. Nous en trouvons deux autres exemples dans le fameux planh de Sordel: Planher vuelh en Blacatz.
           
E lo reys Castelas tanh qu'en manje per dos...
El coms proensals tanh qu'en manje, sil sove.
(Ed. De Lollis, V, 21, 37.)
 
senher est employé au sens général: un seigneur, tout seigneur, d'où l'absence de l'article.
 
38. ne = en peut se rapporter soit à ce qui précède, soit à ce qui suit. Dans le premier cas, la phrase serait construite un peu irrégulièrement, &, au lieu de s'arrêter après mandamen, se continuerait par une nouvelle proposition explicative. Peut-être est-il préférable de rapporter en à ce qui suit & de le considérer comme annonçant la proposition commençant par que: « loyauté leur recommande ceci: a savoir que... »?
 
41. Alphonse X venait, en effet, à la mort de Guillaume de Hollande (1257), d'être élu empereur par la majorité des électeurs; mais les autres lui opposaient Richard d'Angleterre, frère de Henri III, &, en réalité, il ne réussit jamais à se faire reconnaître comme souverain légitime. Il n'alla jamais en Allemagne, & c'est pour cela que le poète lui reproche de ne savoir pas vouloir la réalisation de ses desseins. Ce que nous savons par ailleurs de son caractère confirme le jugement du poète. C'était un esprit très ouvert, prompt à concevoir, mais sans fermeté & sans énergie pour l'action.
 
43. Les allusions à la muza ou à l'esperansa des Bretons attendant toujours le retour du roi Arthur sont fréquentes dans la poésie des troubadours. Cf. Cnyrim, Sprichwoerter der altprovenz. Lyrik, p. 53.
 
44. Que d'aut rey tanh. — Sur cette construction proleptique, cf. la note au vers 25, & à I, 20.

 

 

 

 

 

 

 

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