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Arveiller, Raymond; Gouiran, Gérard. L’œuvre poétique de Falquet de Romans, troubadour. Aix-en-Provence: C.U.E.R. M.A. - Université de Provence, 1987.

Édition revue et corrigée pour Corpus des Troubadours, 2013.

156,003- Falquet de Romans

v. 2 : si tut. Comme le montrent la plupart de ces notes, la correction et même la logique grammaticales ne semblent pas avoir particulièrement préoccupé le copiste de T.
flor. On serait tenté de dire que le copiste a pris grand soin de modifier en -ors la rime en -or qu’exige pourtant la syntaxe. Seul le mot socor, v. 19, a échappé à ce qu’on n’ose appeler sa vigilance. Il paraît indispensable de rétablir la rime avec flor, puis paor (paurs), v. 3 ; lausor (llausrs), v. 10 ; color (colors), v. 11 ; Blanciflor (Blanciflors), v. 18 ; emperador (eperadors), v. 26 ; megllior (meglliors), v. 27.
 
v. 3 : ci. On peut comprendre le vers sans corriger en ce (Appel, Prov. Ined., 96) ou en que (Zenker, éd. cit., 48). Qui pour cui se rencontre dans les chansonniers occitans à partir du XIIIº siècle ; pour L, du XIVº, cf., ci-après, V, v. 13 : qui fin’amors capdella ‘celui que conduit l’amour parfait’. Comme, d’autre part, T écrit souvent c- là où l’on trouve ordinairement qu- (v. les vv. 12, 23, etc.), on peut penser que l’on a ici affaire à un datif : ‘(moi) à qui ...’.
freç ... ni gel. Le ms. indique frec, où le -c final note peut-être une affriquée que les copistes italiens transcrivent souvent par -ç ; v. en VII, tornaç, v. 11 ; preç, vv. 30, 70 ; malvaç, v. 39; coronaç, v. 70 ; et en XIV, denç, v. 89 ; voleç, v. 106 ; toç, v. 112 ; senteç, v. 155. La correction est donc minimale, épargnant gel, qui peut désigner ‘les gelées’, au pluriel, le verbe s’accordant avec le sujet le plus proche.
 
v. 5 : alegrars. Pour avoir été moins cruellement estropiés que les mots en -or, les mots rimes en -ars ne sont pas sortis indemnes de la main de notre copiste. Nous ne signalons que pour mémoire le double -s final dans alegrarss. Plus graves sont les modifications suivantes : cantrs pour cantars, v. 6 ; nas pour nars, v. 13 ; aprivasers pour aprivasars, v. 21.
Au v. 5, comme au v. 21, le pronom réfléchi n’est pas exprimé devant l’infinitif ; v. l’explication infra, XII, n. aux vv. 10-11.
 
v. 7. Pour ce vers hypermétrique : puois p(er) son servidor mi rete, il semble préférable, comme l’ont fait les éditeurs précédents, de supprimer son plutôt que le préverbe re-.
 
v. 8 : es. Faute d’autres exemples, nous corrigeons le e du manuscrit.
 
v. 9 : vic. Une mélecture regrettable a causé de sérieuses difficultés aux éditeurs précédents qui ont vu Anc dompna non me tan plaisen et ont pris le prétendu me pour un pronom personnel élidé suivi du verbe être. Cela rendait impossible, sauf à admettre une licence poétique, le cas régime plaisen. En fait, le copiste n’a pas écrit me (m’e), mais vic.
 
v. 10 : lausor. Autre mauvaise lecture : Appel et Zenker ont vu ssalosrs, qu’ils ont interprété en valors. Le mot est en fait llausrs, qu’il faut corriger en lausor(s).
 
v. 11. Nous reprenons pour ce vers : Et ab plus fressca colors l’ingénieuse correction de Zenker : Et a be plus f. color.
 
v. 13. Ce vers est trop long dans le ms. : bella bocha bels uogltç e bel nas. Appel et Zenker suppriment le dernier bel pour y remédier. Le copiste a modifié en nas le mot rime nars, qui est rare, mais que l’on rencontre chez Raimbaut d’Aurenga : E si vos fan respos peiors Datz lor del ponh per mieg sas nars, XX, vv. 21-22, éd. W.T. Pattison, 131. V. encore per la nar dans Jaufre, vv. 1391, 2416, 2447 et 5739, éd. R. Lavaud et R. Nelli, Les Troubadours, I. Pour les avatars du latin nāris, v. FEW VII, 15a. La correction d’Appel et de Zenker paraît la seule possible, puisque nar est féminin.
 
v. 18 : Floris Blanciflor. V. supra II, v. 7 et la note.
 
vv. 20-21. Appel corrige noi en no, Prov. Ined., 96, et V. de Bartholomaeis, qui suit Zenker, traduit : “e non mancano /intorno a me/ delle persone vili ; /ma/ a me non piace aver familiarità con /nessuna/ persona abbietta”, Poes. prov. stor., II, 45. Plutôt que de voir dans ce vers le passif son privatz, avec les éditeurs précédents, il semble préférable, pour la logique de la strophe, de considérer qu’il s’agit de l’adjectif privat ‘privé, intime, familier’, Levy, P. D. 308a. Le sens ne serait donc pas ‘auprès d’elle, je ne suis pas privé de personnes viles’, mais : ‘auprès d’elle, je ne suis pas familier de personnes viles’, car la compagnie de la dame est choisie. De telles considérations se retrouvent chez Bertran de Born : No·m platz compaigna de basclos, XXXVI, v. 25, éd. G. Gouiran, 714, et Uc de Sant-Circ : Ab nuilla bona compaingna No s’atrai ni s’acompaingna ; Rofians I trobaretz e putans, Car ges de lor non s’estraingna Ni l’es lor paria estraingna, CCLXXII, vv. 37-42, dans M. de Riquer, Los Trovadores, 1347.
 
vv. 22-23. Le vers 22, tel que le présente T, est hypométrique. Zenker corrige le premier mot abm en ab un. Comme le ms. omet parfois les voyelles (cantrs, 6 ; llausrs, 10), on pense plutôt à abom, à lire ab om, avec une forme de régime singulier refaite sur le cas sujet. E. Levy remarque en effet que “la forme hom se trouve quelquefois au lieu de la forme régulière home” pour le cas en question, et il en donne quatre exemples, dont deux après préposition (vas nulh hom, de nulh hom), RLR XXV, 1884, 46. On en trouve trois autres chez Appel, Chrest., VII, n. 3, dont un après préposition (vas hom). Le vers 23, en revanche, est hypermétrique. Appel, Prov. Ined., 97, et Zenker après lui, ont lu ni ab lausengier. En conséquence, ils ont vu dans ni une reprise fautive du ni de ni trop au vers précédent, et ont supprimé la conjonction, retrouvant un octosyllabe. En fait, le ms. présente mab, avec un m bien net, identique au premier m d’amorosamen, 1, au m de mi, 7, et à celui de e·m, 19 ; de plus T place en général un trait sur le i, ce qu’il ne fait pas ici. On peut donc penser qu’un premier scribe a ajouté un ni dans les conditions signalées et qu’après lui un second scribe a lu à tort m au lieu de ni.
 
v. 27 : lo megllior. En dépit de l’opinion de Zenker, qui va jusqu’à supposer qu’une strophe s’est perdue, éd. cit., 83, la suite des idées ne nous paraît pas si obscure. De même que la dame sait choisir son entourage, l’empereur sait distinguer qui le mérite et le mot s’applique peut-être à Falquet lui-même : Frédéric accueillera bien la chanson, car, en fait de poètes, il sait reconnaître le meilleur.
 
vv. 31-32. Il est à craindre que ces vers ne soient irrémédiablement corrompus. On lit dans le ms. : coplus soreter qelue adess itrop mais debe. De plus, le s de soreter fait problème. Appel note : “unter dem s, stand ursprünglich ein anderer Buchstabe, etwa b ?”, op. cit., 97. On pourrait aussi songer à un r sur lequel aurait été tracée une lettre longue, s, l ou f. Zenker corrige en : Co plus om retrai que i ve A des /sic/ i trop eu mais de be, éd. cit., 19. Jeanroy préfère : Que, cum o retrai qui lo ve (ou ne ve), Ades i trop on mais de be, Revue critique d’histoire et de littérature, n. série, XLII, 1896, 369. De Bartholomaeis suit Zenker, en modifiant seulement le v. 32 en : Ades i trop on mais de be. Il interprète : ‘come si narra da chi viene da lui, si trova in lui sempre più del bene’, op. cit., II, 45. Cette traduction ne rend pas compte du mot plus. Mais la chute d’une barre de nasalisation se constate dans le ms. de la chanson aux vers 26 et 33. On peut supposer qu’il en va de même au vers 31 et lire c’on pluss, en détachant le s de soreter pour le joindre au mot précédent. La locution on plus introduit assez souvent le premier terme dans un système exprimant la variation proportionnelle ; exemple : On plus n’ay melhor coratge D’amor, mielhs m’es deslonhada, Marcabru, dans Appel, Chrest., 54a. Ades peut, dans ce cas, précéder le second terme ; exemple : C’ades, on plus mes poders creis, Ai major ir’ab mi meseis ‘car plus s’accroît ma puissance, plus je ressens grand chagrin en moi-même’, Raimbaut de Vaqueiras, vers cités dans la Vida, texte (ms. P) et traduction selon J. Boutière et A.-H. Schutz, Biographies des troubadours, Paris 1964, 453. Reter peut être la résolution d’une abréviation mal lue : un petit a susorit au t (pour noter la fin de retra, variante attestée de retrai) a dû être pris pour un e et le mot être lu alors *retre ou reter. Pour qelue, la mesure du vers exige trois syllabes : une voyelle manque. On pense à qe lo ve ‘qui le voit /sc. l’empereur/’, en se fondant sur le sens et aussi le parallélisme des vers suivants : Qu’a totz aug dir e retraire Que mais l’am hom on plus lo ve, Le troubadour Elias de Barjols, éd. S. Stroński, Toulouse 1906, VI, vv. 47-48, p. 15. On a conservé le qe du ms., bien que qui (qi) soit utilisé en général quand l’antécédent du relatif n’est pas exprimé ; v., en dernier lieu, F. Jensen, The Syntax of Medieval Occitan, Tübingen 1986, 141. Enfin, au v. 32, la forme trop nous fait préférer eu à om pour le pronom omis. D’où le texte proposé ci-dessus, que nous comprenons : ‘si bien que plus celui qui le voit /sc. qui voit l’empereur/ rapporte cela /sc. la conduite mentionnée/, plus je trouve en lui de bien’.
 
v. 34. La syntaxe pourrait fort bien se passer du subordonnant ce, mais le mètre l’exige.
 
v. 35 : del cont. Dans un souci de correction, Zenker a remplacé ce tour par que·l coms de Caret. Appel avait admis auparavant : del conte de Caret, ce qui donnait un vers de neuf syllabes. Il vaut sans doute mieux conserver le texte du manuscrit, car la forme comt est aussi attestée pour le cas sujet pluriel, chez Bertran de Born, XXX, v. 20, éd. cit., 618, leçon des trois manuscrits (I, K, d) . Il semble qu’il y ait eu influence du cas sujet singulier, monosyllabique, très employé en apostrophe, coms, sur les cas régime singulier et sujet pluriel, dissyllabiques, comte, et ainsi constitution d’une variante comt (cont) pour ces derniers cas.

 

 

 

 

 

 

 

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